Le 19 octobre, la Commission européenne a publié les résultats de son Eurobaromètre sur l’attitude des Européens vis-à-vis du bien-être animal, le précédent datant de 2016. L’enquête a été menée en mars 2023 et dénombre 26 376 répondants issus des 27 États de l’UE (ainsi que de différents groupes sociaux et démographiques). L’occasion pour nous d’un nouveau décryptage !
à retenir
- Les Européens ont conscience que la réglementation de l'UE est plus protectrice des animaux que celle d'autres pays hors UE mais ils souhaitent également des politiques plus ambitieuses
- Ils veulent une meilleure protection des animaux au sein des abattoirs mais aussi une réduction de leur temps de transport
- Une écrasante majorité de citoyens estime que les élevages doivent assurer une nourriture suffisante, un environnement adapté, suffisamment d'espace, un personnel qualifié et formé
- La fin de certaines pratiques d'élevage est souhaitée comme l'élevage en cage ou pour la fourrure, les mutilations à vif, la mise à mort des poussins mâles en filière pondeuse
- Les citoyens sont prêts à payer plus pour plus de bien-être
Le 19 octobre, la Commission européenne a publié les résultats de son Eurobaromètre sur l’attitude des Européens vis-à-vis du bien-être animal, le précédent datant de 2016. L’enquête a été menée en mars 2023 et dénombre 26 376 répondants issus des 27 États de l’UE (ainsi que de différents groupes sociaux et démographiques). L’occasion pour nous d’un nouveau décryptage !
Des attentes sociétales fortes en matière de bien-être animal
L’Eurobaromètre 2023 confirme que le bien-être animal est au cœur des préoccupations des citoyens européens : 91% des répondants pensent qu’il est important de protéger le bien-être des animaux d’élevage.
Surtout, selon les données recueillies, les Européens semblent faire le constat d’une insuffisance des règles européennes et nationales en matière de protection animale, constat qui tend à perdurer dans les mentalités. En effet, déjà en 2016, 82% des Européens et 88% des Français estimaient que le bien-être des animaux d’élevage devrait être mieux protégé. Aujourd’hui, ils sont respectivement 84% et 92% à faire le même constat. L’animal de compagnie n’est pas en reste, puisque 74% des Européens et 85% des Français souhaitent voir leur bien-être mieux protégé.
Il est intéressant également de noter que la majorité des Européens (62%) et des Français (72%) estime que les règles européennes relatives au bien-être animal devraient s’appliquer aux aliments importés. A l’heure où un poulet sur deux consommé en France est importé, souvent en provenance de pays moins protecteurs du bien-être (comme le Brésil ou l’Ukraine), cette donnée paraît particulièrement intéressante.
Les citoyens européens semblent ainsi à la fois avoir conscience que la réglementation européenne est plus protectrice en matière de bien-être animal que celle d’autres pays hors Union, tout en souhaitant des politiques plus ambitieuses pour améliorer la condition des animaux en Europe.
Une demande pour une meilleure protection des animaux au moment du transport et de l’abattage
Cet Eurobaromètre met également en lumière la volonté des citoyens européens de voir évoluer les conditions de transport et d’abattage des animaux d’élevage.
Ainsi, 83% des répondants européens et 85% des Français considèrent que le temps de transport au sein et en provenance de l’Union européenne devrait être limité. La Commission européenne s’est justement engagée à réviser le règlement sur le transport d’animaux vivants, modification attendue pour la fin de l’année 2023.
Par ailleurs, 88% des Européens et 92% des Français pensent qu’il est important d’améliorer la protection des animaux en abattoir, en y renforçant par exemple les contrôles officiels, notamment à l’aide de caméras (pour en savoir plus sur la protection des animaux en abattoirs, n’hésitez pas à consulter notre article sur le sujet).
Quelles conditions d’élevage éthique pour les Européens ?
L’Eurobaromètre indique ce que les Européens considèrent relever du bien-être animal au sein des élevages.
94% des Européens et 97% des Français estiment que les élevages doivent assurer aux animaux une nourriture suffisante ainsi qu’un environnement adapté à leurs besoins de base, comme de la boue ou de la paille. A l’heure où la plupart des porcs sont élevés en bâtiments (vous pouvez consulter notre fiche élevage ici) sans accès à de la boue, et bien souvent à de la paille, cet accent mis sur l’importance de l’enrichissement du milieu des animaux élevés paraît particulièrement intéressant[1].
Par ailleurs, 94 % des répondants européens et 97% des Français pensent qu’il est nécessaire que les animaux aient suffisamment d’espace pour bouger, s’allonger et se mettre debout.
Enfin, pour 93% des Européens et 97% des Français, le personnel qui manipule les animaux doit être suffisammentformé et qualifié. En France, depuis le 1er janvier 2022, tous les élevages d’animaux domestiques doivent désigner un référent en charge du bien-être animal, référent obligatoirement formé dans le cas de l’élevage de porcs et de volailles.
Les Européens souhaitent la fin de certaines pratiques
Il ressort de cet Eurobaromètre, que les citoyens européens semblent aspirer à la fin de certaines pratiques d’élevage.
Ainsi, 89% des répondants européens et français soutiennent l’interdiction de la coupe de certaines parties du corps des animaux (queue, oreilles, bec, testicules, dents, etc.), sauf s’il s’agit d’assurer la protection et la sécurité des travailleurs/éleveurs et dans la mesure où un anesthésiant est utilisé. L’usage d’un anesthésiant pour couper la queue ou les oreilles, meuler les dents des porcs, ou épointer le bec des volailles n’est de fait pas requise par la réglementation européenne actuellement et donc pas toujours mise en place dans la pratique. Cependant, depuis le 1er janvier 2022, la France a fait le choix d’interdire la castration des porcelets sans le recours à une anesthésie/analgésie (vous pouvez consulter notre article à ce sujet ici).
Par ailleurs, la fin des cages individuelles semble plébiscitée par 89% des Européens et 94% des Français. Suite au succès de l’Initiative citoyenne européenne « End the Cage Age » qui a rassemblé plus de 1,4 million de signaturesde citoyens européens, la Commission européenne s’est justement engagée à proposer une révision de la règlementation en ce sens[2].
Concernant l’élevage des animaux pour leur fourrure, 62% des Français et 57% des Européens pensent qu’il devrait être interdit. Ce chiffre semble moins unanime que pour d’autres pratiques. De fait 32% des répondants européens et 30% des Français sont d’accord de maintenir l’élevage pour la fourrure s’il est encadré par des normes de bien-être spécifiques. Pour ce qui est de la France, ce résultat semble contredire certains sondages réalisés dans l’Hexagone : ainsi, d’après le sondage IFOP 2022, 89% des Français se déclaraient contre le commerce de la fourrure. La France a d’ailleurs opté, depuis la loi visant à lutter contre la maltraitance, pour l’interdiction de l’élevage des visons et de toutes autres espèces non domestiques élevées pour leur fourrure, interdiction entrée en vigueur au 1er janvier 2023 (vous pouvez accéder à notre décryptage de la loi ici).
Enfin, la mise à mort des poussins mâles dans la filière pondeuse est jugée totalement inacceptable pour 63% des Français et 50% des Européens et ce même si cela suppose une hausse du prix des œufs. En France, depuis le 1er janvier 2023 la mise à mort des poussins mâles de souche brune dans la filière pondeuse est interdite (si vous souhaitez savoir pourquoi les poussins mâles sont mis à mort dans la filière pondeuse mais aussi accéder à notre décryptage de l’interdiction c’est ici).
Volonté d’être informés et propension à payer des citoyens
Plus de bien-être animal dans les élevages rime souvent avec une augmentation des coûts et une répercussion sur les prix finaux. Si les citoyens européens se disent ainsi favorables à une amélioration du bien-être animal, il est intéressant également d’évaluer s’ils sont prêts à payer plus cher des produits plus respectueux des animaux. Selon l’Eurobaromètre, 26% des Européens et 31% de Français seraient d’accord pour payer 5% plus cher les produits provenant d’exploitations respectueuses du bien-être animal. 20% des Européens et 23% des Français accepteraient de payer 10% plus cher. Au total, ce sont 60% des Européens et 65% des Français qui se disent prêts à accepter un surcoût entre 5 % et plus de 20%.
Par ailleurs, les citoyens européens se disent plutôt soucieux de pouvoir identifierles produits plus protecteurs du bien-être des animaux. 60% des Européens et 61% des Français affirment rechercher des labels indiquant un respect du bien-être animal. Pour 51% des Français, les magasins et supermarchés ne proposent pas un choix suffisant de denrées alimentaires favorables au bien-être animal, un chiffre bien au-dessus de la moyenne européenne (43% pour les Européens).
Enfin, il est intéressant de noter que 67% des Européens et 71% des Françaissouhaiteraient avoir davantage d’information sur les conditions dans lesquelles les animaux sont traités dans les élevages. Résultat qui confirme le sens du travail de la Chaire bien-être animal dont l’une des missions est justement d’informer le citoyen sur l’élevage, les conditions de vie des animaux et la prise en compte du bien-être animal !
[1] A noter toutefois qu’en France, des nouvelles obligations d’enrichissement pour les porcs ont été mises en place avec l’arrêté du 24 février 2020 modifiant celui du 16 janvier 2003.
[2] https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/fr/qanda_21_3298
à retenir
- Les Européens ont conscience que la réglementation de l'UE est plus protectrice des animaux que celle d'autres pays hors UE mais ils souhaitent également des politiques plus ambitieuses
- Ils veulent une meilleure protection des animaux au sein des abattoirs mais aussi une réduction de leur temps de transport
- Une écrasante majorité de citoyens estime que les élevages doivent assurer une nourriture suffisante, un environnement adapté, suffisamment d'espace, un personnel qualifié et formé
- La fin de certaines pratiques d'élevage est souhaitée comme l'élevage en cage ou pour la fourrure, les mutilations à vif, la mise à mort des poussins mâles en filière pondeuse
- Les citoyens sont prêts à payer plus pour plus de bien-être
CHIFFRE CLÉ
des Français estiment que le bien-être des animaux d’élevage devrait être mieux protégé