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Rien n’est fait pour protéger les animaux en abattoirs, VRAI ou FAUX ?

FAUX

Initialement centrées sur la notion d’hygiène alimentaire, les lois encadrant les activités des abattoirs ont progressivement intégré la question de la protection animale lors de la mise à mort. L’amélioration de cette protection repose sur la formation du personnel et l’évolution des pratiques.

à retenir

La création des abattoirs au XIXème siècle ainsi que leur industrialisation ont progressivement éloigné les citoyens de la réalité du processus d’abattage des animaux. Ainsi, aujourd’hui, la très grande majorité des consommateurs méconnait les conditions d’abattage des animaux dont est issue la viande qu’ils consomment. Ils ignorent également la règlementation qui encadre l’abattage, notamment celle concernant la protection animale[1].

Le saviez-vous ?

Le terme "protection animale" désigne les normes s'inscrivant dans une démarche préventive de la souffrance animale et de la maltraitance. A l'abattoir où les animaux sont mis à mort, il est préféré à celui de "bien-être animal", qui traduit  un état durable impliquant un état mental positif.

Par ailleurs, les cas de mauvais traitements rapportés par les médias à la suite d’enquêtes menées par certaines associations abolitionnistes constituent bien souvent les seules informations à disposition des citoyens, ce qui attise leur méfiance et accroît leur déconnexion de la réalité des conditions d’abattage.

Quelle règlementation en vigueur protège les animaux au sein des abattoirs ? Comment leur mise en application est-elle contrôlée ? L’équipe de la Chaire bien-être animal vous explique tout dans cet article !

Pour ce faire, nous commencerons par retracer brièvement l’histoire des abattoirs. Ensuite, nous verrons comment la réglementation encadre l’ensemble des étapes de la mise à mort des animaux. Enfin, nous nous intéresserons à la façon dont les services de l’Etat contrôlent le respect de cette réglementation et veillent à la protection des animaux au sein des abattoirs. 

L’histoire des abattoirs en France

En France, le décret impérial du 9 février 1810, sous l’impulsion de Napoléon 1er, entérine la création des premiers abattoirs : ces derniers voient alors le jour en 1818, à proximité immédiate du cœur de Paris. La concentration en un même lieu de ce que l’on appelle à l’époque « les tueries individuelles » a un objectif sanitaire mais également moral.

Le premier vise à rendre plus efficace le contrôle de la salubrité de la viande et à réduire les nuisances occasionnées par l’évacuation des déchets. Le second répond au souhait de soustraire les citoyens au spectacle de la mise à mort des animaux destinés à la consommation. En effet, jusqu’alors, le bétail était mis à mort par les bouchers eux-mêmes dans des espaces accolés à leurs étals et ouverts sur la rue, les « tueries individuelles », qui servaient aussi bien d’annexe à l’atelier de découpe que d’égouts. Or, d’après certains historiens et philosophes, à l’image de Montaigne ou Kant, les actes de violence perpétrés à l’encontre des animaux favorisent l’augmentation du niveau de violence des hommes entre eux[2].

En raison des résistances de la part des bouchers, le développement des abattoirs met du temps à s’opérer en France. Ainsi, en 1938, soit plus d’un siècle après leur création, on dénombrait en France seulement 1781 abattoirs alors que perduraient encore environ 30 000 « tueries individuelles ». L’interdiction de ces tueries en 1941 permet d’atteindre 3327 abattoirs en 1948[3].

📌 A savoir 

En 2021, la France ne comptait plus que 240 abattoirs pour animaux de boucherie produisant annuellement 3,7 millions de tonnes équivalent carcasse (dans l’ordre d’importance de production : porcins, bovins, ovins et caprins, équins)[4]. On dénombre également plus de 600 abattoirs agréés de volailles et lapins, dont seulement une centaine ont une activité significative (plus de 500 tonnes par an) selon FranceAgriMer[5]. En 2021, ils ont produit 1,1 million de tonnes de volailles[6].

Dans les années 1980, la prise en compte du point de vue de l’animal permet de faire évoluer les infrastructures de manière considérable, notamment aux Etats-Unis. Pionnière dans le domaine, Temple Grandin, professeure dans le département de sciences animales à l’université du Colorado utilise par exemple le fait que les bovins se déplacent naturellement en groupe suivant des courbes pour proposer aux abattoirs des circuits larges et courbés, facilitant le déplacement des bovins sans contrainte :  la protection animale est améliorée et les performances des abattoirs accrues. 

L’évolution des connaissances en éthologie et la pression croissante exercée par la société ont ainsi conduit les abattoirs, initialement conçus dans un objectif de protection de la sensibilité humaine, à faire de celle de l’animal une priorité

Les obligations des exploitants d’abattoirs en matière de protection animale

Après avoir présenté les règles générales qui s’appliquent aux activités d’abattoirs dans l’Union européenne, nous nous intéresseront plus en détail à la question de l’étourdissement préalable à la saignée et à celle de la formation du personnel d’abattoirs.

Cadre réglementaire européen [7]

Au niveau communautaire, le règlement (CE) N°1099/2009 constitue le texte de référence en matière de protection des animaux d’élevage au moment de leur mise à mort. Il repose sur le principe de base suivant : « toute douleur, détresse ou souffrance évitable est épargnée aux animaux à chaque étape de la mise à mort ».

Entrées en vigueur en janvier 2013, traduites voire précisées en droit français[8], les dispositions phares du Règlement (CE) n°1099/2009 sont les suivantes :

Le saviez-vous ?

D’après le règlement (CE) N°1099/2009, le recours à des Appareils Soumettant les Animaux à des Chocs Electriques (ASACE) appelés couramment « piles électriques » est, dans la mesure du possible, évité. Ces derniers ne peuvent être utilisés que pour stimuler les bovins et les porcs adultes qui refusent de se déplacer alors qu’ils en ont la place. Les animaux qui y sont soumis ne doivent pas présenter de faiblesse particulière. Les chocs ne peuvent être appliqués que sur les membres postérieurs, ne doivent pas durer plus de 1 seconde et doivent être convenablement espacés. Enfin, ils ne doivent pas être répétés si l’animal ne réagit pas [13].

Gestion de l’étourdissement préalable à la saignée

L’étourdissement préalable à la saignée de l’animal est une obligation règlementaire. Il a pour but de rendre l’animal inconscient, c’est-à-dire insensible aux stimulations venant de son environnement ou de son corps. Les animaux des espèces en question étant capables d’émotions positives et négatives, l’inconscience permet d’empêcher qu’ils ne ressentent de la douleur et de la peur pendant la mise à mort[14].

Il existe trois grands types d’étourdissement pratiqués en abattoirs : mécanique, électrique et par exposition au gaz

L’animal doit être maintenu dans un état d’inconscience et d’insensibilité profondes jusqu’à sa mort[15]. Pour contrôler l’état d’inconscience des animaux, les opérateurs de la chaîne d’abattage, chacun à leur poste, utilisent une combinaison d’indicateurs[16]

A noter que certaines manifestations comportementales, si elles sont visuellement impressionnantes, ne traduisent pas pour autant un état de conscience de l’animal : c’est le cas par exemple des mouvements réflexes non orientésdes membres et de la tête chez les bovins.

En tout état de cause, le doute doit profiter à l’animal : la présence d’un seul signe évocateur de risque de conscience doit entraîner un second étourdissement immédiat.

En complément du contrôle permanent et systématique, un deuxième contrôle aléatoire, supervisé par le responsable protection animale (RPA), est réalisé par échantillonnage (et non sur la totalité des animaux). 

📌 Et l’abattage sans étourdissement alors ?

La règlementation prévoit une dérogation pour certains abattages religieux, notamment juifs et musulmans, dont les pratiques rituelles sont incompatibles avec un étourdissement préalable à la saignée. Les animaux peuvent alors être abattus sans avoir été rendus inconscients en amont. 
Bien qu’il n’existe pas de position officielle des autorités religieuses à ce sujet, un étourdissement post-saignée, appelé « soulagement », est parfois pratiqué pour limiter la souffrance de l’animal.
En France, l’abattage rituel doit impérativement se dérouler dans un abattoir[17]. Ce dernier doit être en mesure de justifier les éléments suivants [18] :

  • une autorisation délivrée par le préfet du département ; 
  • un personnel formé aux spécificités de l’abattage sans étourdissement (voir partie III) ;
  • des commandes commerciales du marché rituel qui nécessitent l’usage de cette dérogation et prouve les volumes d’animaux concernés ;
  •  la réalisation de l’abattage rituel par un sacrificateur habilité par les organismes religieux agréés.

Formation des opérateurs

La façon de manipuler les animaux a un impact majeur sur leur bien-être. D’après l’EFSA, l’autorité européenne de sécurité des aliments, les principales menaces pour la protection animale sont directement liées à un manque de compétences ou de formation du personnel, à l’origine de manipulations inappropriées et d’installations mal conçues[19].

Pour garantir une formation minimale des opérateurs en abattoirs, le règlement (CE) N°1099/2009 impose que ces derniers soient titulaires du Certificat de Compétence « Protection des Animaux lors de leur mise à mort » (CCPA) correspondant à leur fonction : manipulation et soins aux animaux ou mise à mort avec ou sans étourdissement. Le responsable protection animal (RPA) doit, quant à lui, être titulaire du certificat de compétence pour toutes les catégories d’activités de l’établissement dans lequel il est employé.

Quel que soit le CCPA choisi, le programme de formation est centré sur trois domaines[20] :

  • Connaissance de l’animal (comportement, physiologie, conscience, sensibilité) et des principes fondamentaux déterminant une interaction favorable entre l’opérateur et l’animal dans la pratique courante,
  • Connaissance de la réglementation en lien avec la conduite à tenir dans des situations courantes,
  • Connaissance du geste technique.

La formation est d’une durée minimale de 7 heures pour les opérateurs et 14 heures pour les RPA, avec une journée de formation supplémentaire spécifique aux missions du RPA. En cas de réussite à l’évaluation individuelle de fin de formation, le certificat de compétence délivré est valable 5 ans

📌 A savoir !

En 2022, on dénombrait 29 982 candidats à l’obtention du CCPA, toutes catégories confondues : 29 762 ont réussi l’évaluation soit 99.27% de réussite[21].

Seuls certains organismes de formation peuvent dispenser la formation de préparation au CCPA. Ils doivent disposer d’une habilitation délivrée par le Ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire après une analyse rigoureuse des supports de formation proposés[22]. Cette habilitation est valable pour une durée de 5 ans.

La liste des organismes habilités à dispenser la formation préparant au CCPA est consultable ici. Celle-ci est mise à jour régulièrement. 

Le contrôle officiel de la protection animale en abattoirs

Après avoir expliqué le rôle du service vétérinaire d’inspection au sein des abattoirs, nous verrons comment ce contrôle a été impacté par la médiatisation de récents cas de maltraitance animale en abattoirs.

Formation des opérateurs

L’activité de production des abattoirs est conditionnée à la présence permanente du service de contrôle officiel dans les locaux : ce modèle constitue une exception française. Chaque établissement doit donc héberger en son sein un service vétérinaire d’inspection (SVI) composé d’un ou plusieurs vétérinaires officiels épaulés par des auxiliaires officiels. Ces agents de l’Etat font partie des services des Direction Départementales de la Protection des Populations (DDPP).

Seule exception : les abattoirs de volailles et lapins au sein desquels le système d’inspection a été réformé en 2012[23] autorisent le personnel des abattoirs à participer aux inspections. Préalablement formé à cet effet par des organismes habilités par le Ministère de l’agriculture, le personnel est placé sous le contrôle et la responsabilité du SVI qui, même s’il n’est pas présent de manière permanente, évalue son travail de manière régulière. 

Pour s’assurer du respect de la règlementation en matière de protection animale, le SVI réalise des contrôles de trois niveaux différents : systématiques, réguliers, annuels[24].

Chaque animal fait obligatoirement l’objet d’une inspection ante mortem (IAM) avant son abattage par le SVI[25]. Pour les lapins et les volailles, l’inspection peut ne pas être réalisée sur tous les animaux mais elle peut être limitée à un échantillon représentatif de chaque site d’élevage. Cette inspection doit être réalisée dans les 24 heures qui suivent l’arrivée des animaux à l’abattoir et moins de 24 heures avant leur abattage.

Cette étape permet d’identifier les éventuels animaux à exclure de la consommation humaine et de prioriser les abattages : un animal stressé au comportement dangereux ou un animal présentant un état de faiblesse à la suite du transport sera ainsi abattu en priorité. C’est également l’occasion de détecter d’éventuelles infractions qui auraient été commises en amont, dans l’élevage de l’animal ou au cours de son transport jusqu’à l’abattoir.

La présence du SVI aux postes d’étourdissement et de mise à mort n’est pas permanente. Les différents postes de la chaîne d’abattage sont inspectés toute l’année de manière régulière et inopinée. Le nombre et la fréquence de ces contrôles dépendent des directives définies en début d’année par le Ministère de l’agriculture et des résultats des inspections précédentes.

Une fois par an au minimum, le service vétérinaire d’inspection programme une inspection complète de l’abattoir au titre de la protection animale. A cette occasion, toutes les chaînes d’abattage, toutes les espèces et catégories d’animaux abattus ainsi que tous les modes d’abattage sont contrôlés

📌 A savoir !

En 2019, 1500 inspecteurs conduisaient des contrôles officiels dans les abattoirs de boucherie français[26]

Malgré ce solide socle réglementaire, il existe parfois des abus dans certains établissements, régulièrement mis en évidence par les associations de protection animale. En mars 2016, l’association L214 rendait publiques des images de mauvais traitements voire d’actes de cruauté perpétrés envers les animaux dans plusieurs abattoirs français. Certaines images parfois jugées choquantes par le public ne traduisent toutefois pas nécessairement une non-conformité : c’est le cas par exemple des animaux sur le rail de saignée présentant des mouvements réflexes malgré un état d’inconscience profonde. 

La publication de ces vidéos a toutefois entrainé un certain nombre d’actions de la part des pouvoirs publics, listées ci-après. 

Le saviez-vous ?

Pour que la carcasse soit estampillée et jugée apte à la consommation, il faut : 
- une IAM favorable (animal correctement identifié, propre et sains)
- une IPM favorable (carcasse saine et salubre) 

- un abattage conforme à la réglementation (notamment en matière de protection animale)

Conséquences de la médiatisation des cas de maltraitance en abattoirs sur les contrôles officiels

  • Audits de l’ensemble des abattoirs français :  immédiatement après la publication des vidéos, le ministre de l’Agriculture de l’époque, Stéphane Le Foll, a demandé aux préfets de réaliser, dans un délai d’un mois, une inspection de protection animale dans l’ensemble des abattoirs français, soit 259 établissements à l’époque. L’audit, publié en mai 2016, rapportait que[27] :
    • 69% des établissements présentaient un niveau de maîtrise de la protection des animaux satisfaisant (20%) à acceptable (49%) ;le niveau de maîtrise des risques était jugé insuffisant dans 31% des cas ; les non-conformités les plus graves ont donné lieu à des suites immédiates pouvant aller jusqu’à l’arrêt de l’activité : cela concernait 19 lignes d’abattage, soit moins de 5 % des chaînes inspectées ;
    • des progrès restaient notamment à faire en matière le plan de formation du personnel et de contrôle interne de l’efficacité des mesures de protection animale, l’exploitant de l’établissement n’étant pas toujours en mesure de prouver tout ce qui a été mis en œuvre pour protéger les animaux. 
    • des progrès restaient notamment à faire en matière le plan de formation du personnel et de contrôle interne de l’efficacité des mesures de protection animale, l’exploitant de l’établissement n’étant pas toujours en mesure de prouver tout ce qui a été mis en œuvre pour protéger les animaux. 
📌One Health/One Welfare

Le concept « une seule santé » (One Health) ou « un seul bien-être » (One Welfare) s’applique également aux établissements d’abattage et les conditions de travail peuvent y être difficiles. Une étude de 2003[28] relative aux conditions de travail dans les abattoirs bretons révélait que 89% des hommes et 92% des femmes avaient souffert d’un trouble musculo-squelettique (TMS) dans les douze derniers mois. Ces douleurs constantes, qui peuvent causer des handicaps irréversibles, ont incontestablement des conséquences sur la qualité de manipulation des animaux. En outre, la confrontation quotidienne à la violence de la mise à mort des animaux conduit 40 % des hommes et 45 % des femmes à déclarer faire face à un travail à forte charge psychologique.

  • Création d’une commission d’enquête sur les conditions d’abattage : présidée par le député Oliver Falorni, cette commission d’enquête parlementaire avait pour objectif d’évaluer les conditions d’abattage. Pour ce faire, elle a procédé à une quarantaine d’auditions d’acteurs de la filière et à plusieurs visites sur sites, dont certaines réalisées de manière inopinée. Le rapport d’enquête contient 65 propositions d’évolution des pratiques en vue d’améliorer la protection des animaux lors de la phase sensible qu’est l’abattage. Certaines de ces mesures ont été rapidement reprises et mises en application, notamment la création d’un comité d’éthique et la mise en place d’une expérimentation de vidéosurveillance.
  • Création d’un Comité national d’éthique des abattoirs (CNEAb) : il a été mis en place en 2017 suite à une saisine du conseil national de l’alimentation (CNA)[29] par le ministre de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire. Cette instance consultative indépendante constitue un outil d’aide à la décision publique. Elle a également pour mission d’émettre des avis à l’attention des décideurs publics et des différents acteurs de la filière alimentaire.
  • Expérimentation de la vidéo surveillance : la loi dite « Egalim », promulguée en 2018, a intégré la mise en œuvre d’un dispositif de vidéosurveillance au sein des abattoirsdans un cadre volontaire et expérimental, pour une durée de deux années[30].

    Le rapport d’évaluation de cette expérience, publié en juin 2021, indique que seuls cinq établissements d’abattage se sont portés volontaires. Pourtant, les conclusions sont unanimes : « Ils sont unanimement satisfaits du dispositif qu’ils trouvent utile et pratique. Personne ne souhaite le supprimer ». Les auteurs du rapport en concluent que « le dispositif de contrôle par vidéo est un outil de progrès qui permet de réduire les non-conformités éventuelles dans les procédures de maîtrise de la protection animale en abattoirs »[31]

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 Bien que ce soit en dehors de ce dispositif, de nombreux autres abattoirs français expérimentent ou utilisent la vidéo surveillance, y compris pour augmenter leur niveau de contrôle de la protection animale

CECILE BOURGUET, DOCTEURE EN ETHOLOGIE ET PHISIOLOGIE DU STRESS

Le saviez-vous ?

La présence de dispositifs de vidéo surveillance dans certaines zones de manipulation des animaux vivants est nécessaire pour obtenir les niveaux A et B de l’Étiquette Bien-Être Animal. Ce label, qui se base sur un ensemble d’indicateurs évaluant toute la vie de l’animal, de la naissance à l’abattage, concerne pour le moment uniquement les poulets de chair [32].

  • Création du délit de maltraitance en abattoirs : la loi Egalim, étend le délit de maltraitance exercé dans le cadre d’une activité professionnelle aux abattoirs et double les peines encourues[33]. Désormais : « Est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende le fait pour toute personne exploitant […] un établissement d’abattage […] d’exercer ou de laisser exercer sans nécessité des mauvais traitements envers les animaux placés sous sa garde » (article L215-11 du Code rural et de la pêche maritime).
    Par ailleurs, les personnes physiques coupables de mauvais traitements envers les animaux encourent également les peines complémentaires d’interdiction, à titre définitif ou non, de détenir un animal et d’exercer, pour une durée de cinq ans au plus, une activité professionnelle ou sociale au contact d’animaux.
📌Infractions spécifiques aux activités d’abattoirs

Le fait de ne pas immobiliser les animaux préalablement à leur étourdissement, de saigner ou de suspendre un animal conscient, ou encore de pratiquer un abattage rituel sans y avoir été habilité constitue une contravention de la 4ème classe punie d’une amende de 750€ (article R215-8 du Code rural et de la pêche maritime).

L’augmentation de la pression de contrôle étant limitée par le manque d’agents au sein des services vétérinaires[34], ces nouveaux dispositifs sont des compléments importants au contrôle de la protection animale en abattoirs.

Conclusion

L’entrée en vigueur du règlement européen, il y a tout juste dix ans, a permis une meilleure prise en compte de l’animal dans ce contexte particulier qu’est l’abattoir : modes opératoires normalisés, présence d’un responsable protection animale, formation obligatoire de tous les opérateurs, etc. 

Pourtant, plusieurs actes de maltraitance survenus dans des abattoirs et rendus publics dans les médias ont conduit le législateur à faire également évoluer la réglementation nationale, en créant notamment le délit de maltraitance en abattoir.  

Pour diminuer au maximum la souffrance physique et psychique des animaux au sein des établissements d’abattage, en plus de sanctions exemplaires, la réglementation et la formation des opérateurs doivent évoluersimultanément pour prendre en compte les nouvelles connaissances issues de la recherche en matière de comportement et de sensibilité animale.

Pour résumer

Article relu et corrigé par Cécile Bourguet, docteure en éthologie et physiologie du stress, responsable du bureau Etudes et Travaux de Recherche en Ethologie et Bien-être Animal (ETRE), auteur de plusieurs publications scientifiques sur le thème de la protection animale en abattoirs

[1] Rapport n°4038 fait au nom de la commission d’enquête sur les conditions d’abattage des animaux de boucherie dans les abattoirs français

[2] Maurice Agulhon, « Le sang des bêtes : le problème de la protection des animaux en France au XIXème siècle », Romantisme n° 31, 1981, https://www.cairn.info/criminologie–9782340063105-page-178.htm

[3] De la place de l’inspection vétérinaire en abattoir en santé publique vétérinaire. Évolutions et perspectives. Anne-Marie Vanelle. Bulletin de l’Académie Vétérinaire de France Année 2018 171-2 pp. 106-116

[4] Agriculture.gouv.fr : La protection animale dans les abattoirs de boucherie en France

[5]https://www.franceagrimer.fr/content/download/70466/document/FICHE_FILIERE_VOLAILLE_DE_CHAIR%202023.pdf

[6] https://agreste.agriculture.gouv.fr/agreste-web/download/publication/publie/Chd2215/cd2022-15_SAA_2021D%C3%A9finiifV2.pdf

[7] Règlement (CE) N° 1099/2009 du Conseil du 24 septembre 2009 sur la protection des animaux au moment de leur mise à mort

[8] R214-63 à R214-81 du Code rural et de la pêche maritime, Arrêté du 12 décembre 1997 relatif aux procédés d’immobilisation, d’étourdissement et de mise à mort des animaux et aux conditions de protection animale dans les abattoirs

[9]Règlement (CE) n°1099/2009 : article 6

[10] Règlement (CE) n°1099/2009 : article 6

[11] https://agriculture.gouv.fr/le-plan-gouvernemental-pour-la-protection-et-lamelioration-du-bien-etre-animal
https://www.defenseurdesdroits.fr/sites/default/files/atoms/files/ddd_guide-lanceurs-alertes_maj2023_20230223.pdf

[12] Règlement (CE) n°1099/2009 : articles 7 et 21, Arrêté du 31 juillet 2012 relatif aux conditions de délivrance du certificat de compétence concernant la protection des animaux dans le cadre de leur mise à mort

[13] Règlement (CE) n°1099/2009 : annexe III – 1.9

[14] Claudia C. Terlouw, Cécile Bourguet, Véronique Deiss. La conscience, l’inconscience et la mort dans le contexte de l’abattage. Partie I. Mécanismes neurobiologiques impliqués lors de l’étourdissement et de la mise à mort. La revue française de la recherche en viandes et produits carnés, 2015, 31 (2-2), pp.1-20.

[15] Règlement (CE) n°1099/2009 : article 4, Code rural et de la pêche maritime : article R214-70

[16] Terlouw C., Bourguet C., Deiss V., 2016a. Consciousness, unconsciousness and death in the context of slaughter. Part I. Neurobiological mechanisms underlying stunning and killing. Meat Sci., 118, 133-146.

Terlouw C., Bourguet C., Deiss V., 2016b. Consciousness, unconsciousness and death in the context of slaughter. Part II. Evaluation methods. Meat Sci., 118,147-156.
Terlouw, E.M.C., Ducreux B., Bourguet, C., 2021a. Particularités neurobiologiques et physiologiques des différentes techniques d’abattage – Abattage avec et sans étourdissement : conscience et induction de l’inconscience (partie 1). Viandes & Produits Carnés, VPC-2021-3725.

Terlouw, E.M.C., Ducreux B., Bourguet, C., 2021b. Spécificités des indicateurs de conscience et d’inconscience selon les méthodes d’abattage. Abattage avec et sans étourdissement : évaluation pratique de l’inconscience (partie 2). Viandes & Produits Carnés, VPC-2021-3726

[17] Règlement (CE) n°1099/2009 : article 4.4, Code rural et de la pêche maritime : articles R214-70 et 73

[18] Code rural et de la pêche maritime : articles R214-70 et 75, Arrêté du 28 décembre 2011 relatif aux conditions d’autorisation des établissements d’abattage à déroger à l’obligation d’étourdissement des animaux

[19] EFSA Panel on Animal Health and Welfare. Welfare of cattle at slaughter. EFSA J. 2020, 18, 6275

[20] Arrêté du 31 juillet 2012 relatif aux conditions de délivrance du certificat de compétence concernant la protection des animaux dans le cadre de leur mise à mort – Annexe II

[21] Source interne DGER

[22] Depuis 2023, c’est la Chaire bien-être animal qui assure la mission d’instruction technique des demandes d’habilitation pour le compte de la DGAL.

[23] Arrêté du 30 décembre 2011 relatif à la participation du personnel de l’abattoir au contrôle de la production de viande de volailles et de lagomorphes

[24] Instruction technique DGAL/SDSSA/2022-62 relative à l’organisation des contrôles officiels relatifs à la protection animale en abattoir au moment de la mise à mort et des opération annexes.

[25] Règlement d’exécution (UE) 2019/627 de la Commission du 15 mars 2019 établissant des modalités uniformes pour la réalisation des contrôles officiels en ce qui concerne les produits d’origine animale destinés à la consommation humaine conformément au règlement (UE) 2017/625 du Parlement européen et du Conseil et modifiant le règlement (CE) n° 2074/2005 de la Commission en ce qui concerne les contrôles officiels (Texte présentant de l’intérêt pour l’EEE.)

[26] Agriculture.gouv.fr : La santé au travail des agents de l’État en abattoir : une approche sociologique – Analyse n°133
Les missions des services de l’Etat dans les abattoirs

[27] https://www.editions-legislatives.fr/actualite/protection-animale-dans-les-abattoirs-d-animaux-de-boucherie/

https://agriculture.gouv.fr/bilan-des-plans-de-controle-de-la-protection-des-animaux-realises-dans-les-abattoirs-en-2016-et

[28] État de santé des salariés de la filière viande du régime agricole en Bretagne

[29] Conseil National de l’Alimentation – avis 82

[30] Agriculture.gouv.fr : Lance de l’expérimentation du contrôle par vidéo dans les abattoirs

[31] Comité de suivi et d’évaluation de l’expérimentation du dispositif de contrôle par vidéo dans les abattoirs tel que prévu par l’article 71 de la loi du 30 octobre 2018

[32] https://www.etiquettebienetreanimal.fr/les-criteres-de-letiquette/

[33] LOI n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous : article 67

[34] Question écrite au Senat n°06095 – Insuffisance de la présence de vétérinaires le long de la chaîne d’abattage 

à retenir

CHIFFRE CLÉ

240

Il s’agit du nombre d’abattoirs pour animaux de boucherie (porcins, bovins, ovins, caprins et équins) en France