NON !
Plus que son appartenance à une espèce en particulier, un animal de compagnie tend à être défini en droit français par la nature du lien qui l'unit individuellement à l'humain. Ainsi, la réglementation en vigueur ne précise pas quelles espèces animales peuvent ou non être détenues pour la compagnie. Pour autant, un certain nombre d'espèces animales, notamment sauvages, sont interdites à la détention ou bien soumises à des démarches administratives contraignantes.
à retenir
- L’animal de compagnie est un compagnon détenu sans but économique
- A ce jour, la loi n’établit pas une liste exhaustive des animaux de compagnie : ils peuvent être d’espèces domestiques ou sauvages
- Selon l’espèce et le nombre d’animaux détenus, la détention peut être libre ou soumise à certificat d’engagement, déclaration voire autorisation
Selon un sondage de juin 2023 (Ipsos), 68% des Français considèrent leur chien ou leur chat comme un membre à part entière de la famille. Animaux de compagnie par excellence, le chat et le chien semblent ainsi avoir une place spéciale dans le cœur des Français. Mais peut-on également adopter comme animal de compagnie un tigre, un renard, un hérisson ou encore une vache ?
Qu’est-ce qu’un animal de compagnie ?
Tentative de définition
D’après le Code rural français, “on entend par animal de compagnie tout animal détenu ou destiné à être détenu par l’homme pour son agrément” (article L.214-6). On comprend que, selon la législation française, un animal de compagnie servant à l’agrément de l’Homme, il est avant tout caractérisé par son absence d’utilité et de but économique[1].
En un mot, l’animal de compagnie coûte mais ne rapporte rien, contrairement à l’animal dit « de rente » par exemple (bovins, porcs, volailles, etc.). On note que cette définition du Code rural n’évoque pas la question de l’affection que l’on porte à l’animal de compagnie, ni ne spécifie les espèces qui rentrent dans ce cadre.
La Convention européenne pour la protection des animaux de compagnie du 13 novembre 1987 (signée par la France en 1996 et ratifiée en 2003) est en ce sens plus précise puisqu’elle considère qu’un animal de compagnie est un animal “détenu ou destiné à être détenu par l’homme, notamment dans son foyer, pour son agrément et en tant que compagnon”.
Elle intègre ainsi deux notions supplémentaires : celle de foyer mais aussi celle de “compagnonnage”. Un animal de compagnie serait donc l’animal qui n’a pas d’utilité économique mais aussi l’animal que l’on invite chez nous, c’est-à-dire avec lequel on entretient une certaine proximité physique, et avec lequel on instaure un lien de compagnonnage. Mais là encore, la notion de “compagnonnage” est variable selon les individus, élément mis en avant par Eric Baratay, professeur à l’Université de Lyon, spécialiste de l’histoire des animaux au sein des sociétés humaines et que nous avons interrogé sur la question[2].
Un point sur lequel insiste Eric Baratay en ce qui concerne l’animal de compagnie est la question de l’individualité. On parle ici en effet d’individus animaux qui vivent avec des individus humains. Ainsi, si la notion d’animal de compagnie est, dans la pensée commune, souvent associée à une espèce (chien ou chat par exemple), en réalité, elle se rattache bien à un animal qui “vit à l’état individuel” (Eric Baratay) avec un humain et qui devient son compagnon. Plus que le statut accordé à une espèce en propre, lorsque l’on mentionne l’animal de compagnie, on s’intéresse plutôt au lien qui unit deux êtres.
Cet accent mis sur le lien individuel entre l’humain et l’animal de compagnie au détriment de toute autre considération (telle que l’espèce de l’animal) donne à ce dernier un “caractère unique et irremplaçable”, attesté par la jurisprudence. Ainsi, la première chambre civile de la Cour de cassation, dans un arrêt du 9 décembre 2015, considère qu’un chien de compagnie est “destiné à recevoir l’affection de son maître en retour de sa compagnie” sans “vocation économique, comme une vache laitière en a une” et que cette affection est réputée “unique”. Ainsi, un animal de compagnie ne peut être substituable par un autre, contrairement à un animal de production qui, en raison de sa principale valeur économique, le pourrait.
Le litige opposait une particulière et une éleveuse, cette dernière ayant vendu un chiot atteint de cataracte héréditaire à l’acheteuse. La vendeuse, plutôt que de payer les soins de l’animal, souhaitait proposer son remplacement par un autre, remplacement rendu théoriquement possible par l’article L. 211-9 du Code de la consommation (en raison de la soumission de l’animal au régime des biens prévue à l’article 515-14 du Code civil). Cependant, la Cour de cassation, en soulignant le caractère unique et irremplaçable du chien de compagnie a considéré que le remplacement prévu par le Code de la consommation était inapplicable. Pour accéder à l’arrêt [3].
En résumé, dans la loi française, le lien d’affection qui lie un animal à son propriétaire n’est pas suffisant pour caractériser l’animal de compagnie : la question de l’absence d’utilité économique constitue bien le premier critère aux yeux de la loi même si la jurisprudence retient également l’importance de l’affection unique portée à l’animal en échange de sa compagnie.
Mais alors, qui sont les animaux de compagnie ?
Nous venons de souligner que, plus que son appartenance à une espèce, un animal de compagnie tend à être défini par la nature du lien qui l’unit individuellement à l’humain. En outre, la loi semble instituer certaines espèces comme “animaux de compagnie” par excellence.
Ainsi, le Code rural consacre une section entière aux “dispositions relatives aux animaux de compagnie” (article L.214-6 à L.214-8-2) dans laquelle sont mentionnés avant tout les chiens et les chats. En complément, l’arrêté du 3 avril 2014 qui fixe les règles sanitaires et de protection animale auxquelles doivent satisfaire les activités liées aux animaux de compagnie (élevage, fourrière, refuge, …) mentionne dans ses annexes non seulement les chiens et les chats mais aussi les furets, lapins, rongeurs, poissons, oiseaux.
Ces animaux sont d’ailleurs désignés aujourd’hui comme des NACs (nouveaux animaux de compagnie), catégorie qui s’est élargie pour s’appliquer également à certains reptiles, batraciens, voire certains arachnides et insectes. Face à l’engouement autour des NACs, la loi de lutte contre la maltraitance animale de 2021 a souhaité réglementer davantage la notion “d’animal de compagnie”. La nouvelle version de l’article L214-8 du Code rural prévoit qu’un décret à paraître vienne ainsi établir la liste exhaustive des animaux de compagnie.
Les animaux domestiques : tous des animaux de compagnie ?
Nous l’avons vu, un animal de compagnie est l’animal que vous choisissez pour devenir votre compagnon avec pour objectif principal votre agrément. Mais alors, est-ce à dire que tous les animaux domestiques peuvent remplir cette fonction ? En quoi la notion d’animal de compagnie est-elle différente de celle d’animal domestique ?
La liste des espèces domestiques est établie par la loi
En France, la liste des espèces, races ou variétés d’animaux domestiques est fixée par l’arrêté du 11 août 2006[4]. Dans son article 1, il est précisé que « sont considérés comme des animaux domestiques les animaux appartenant à des populations animales sélectionnées ou dont les deux parents appartiennent à des populations animales sélectionnées ».
En d’autres termes, il s’agit d’animaux dont l’humain a maîtrisé la reproduction afin de sélectionner certains traits, qu’ils soient esthétiques, comportementaux (ex : aptitude au troupeau de certaines races de chien) ou de production (ex : production de lait pour certaines races de vaches).
Certains mammifères, oiseaux, amphibiens, poissons mais aussi insectes sont ainsi considérés comme domestiques par la loi, comme représenté par la figure ci-dessous.
De fait, l’animal domestique peut être de rente, de compagnie… ou libre
Mais tous ces animaux domestiques n’entretiennent pas le même type de relation avec l’humain. En fonction de leur proximité avec l’humain, on distingue parmi ces espèces domestiques, les animaux de compagnie détenus par l’humain pour son agrément, des animaux dits de ferme, d’élevage ou encore de rente définis comme les « animaux élevés ou détenus pour la production d’aliments, de laine, de peau ou de fourrure ou à d’autres fins agricoles et équidés domestiques »[5].
Il existe cependant quelques subtilités. En effet, certains animaux, pourtant d’espèces domestiques, vivent librement, sans interaction avec l’humain : c’est le cas notamment des chats errants et libres[6].
La variété des activités auxquelles le cheval prend part aux côtés de l’humain est remarquable : simple compagnie, balade et randonnée, enseignement en écoles d’équitation, sport au travers d’une trentaine de disciplines différentes, courses, spectacle, traction, élevage, production de lait ou de viande, équithérapie, etc.
Aujourd’hui encore, le cheval apparait de manière indiscutable comme un animal de rente au sens du Code rural. Pourtant, depuis quelques années, il plane autour du statut juridique du cheval une certaine ambigüité. Cette évolution de la perception du cheval se traduit jusque dans les textes : alors que dans sa version initiale, l’arrêté du 25 octobre 1982 mentionnait les « animaux élevés, gardés ou détenus dans des fermes (bovins, ovins, caprins, porcins, équidés, volailles et autres animaux de basse-cour) », faisant du cheval un animal de ferme comme les autres, la version actuellement en vigueur, citée plus haut, effectue une distinction entre le cheval et les autres animaux de rente. Il est le seul pour lequel on choisit de ne pas citer les utilisations visées (probablement parce qu’elles sont trop nombreuses et variées) mais le nom de l’espèce concernée.
Deux propositions de loi, datées de 2010[7] puis 2018[8], visant à modifier le statut juridique du cheval en le faisant passer d’animal de rente à animal de compagnie, vont également dans ce sens. Toutes deux sont restées sans suite à ce jour.
Il semble que l’ambivalence du statut du cheval tienne en grande partie à la proportion de détenteurs d’équidés non professionnels. En effet, on estime que sur la population d’équidés présents en France fin 2022, environ un tiers est détenu en dehors d’une structure professionnelle soit environ 438 000 équidés[9]!
Cela explique d’ailleurs la raison pour laquelle la loi du 30 novembre 2021[10] a rendu obligatoire, au même titre que pour les chiens, les chats, les lapins et le furet, un certificat d’engagement et de connaissance pour les acquéreurs particuliers d’équidés.
En somme, si la loi considère certaines espèces domestiques comme des animaux de compagnie de prédilection (comme le chat ou le chien), en théorie, en fonction du lien entretenu avec l’animal, et notamment en l’absence de lien économique, vous pouvez adopter pour la compagnie n’importe quel animal domestique ! Ainsi, si votre vache ne sert que pour votre seul agrément, elle pourrait tout à fait remplir la fonction d’animal de compagnie !
L’acquisition d’un animal de compagnie d’espèces domestiques
Pour certains animaux de compagnie, à savoir les chiens, les chats, les furets et les lapins, la détention est conditionnée, depuis le 1er octobre 2022, à la signature d’un certificat d’engagement et de connaissance, ayant pour objectif de sensibiliser les futurs détenteurs aux besoins fondamentaux de l’animal en question.
Ce certificat est délivré par un vétérinaire ou par tout professionnel titulaire de l’Attestation de Connaissances pour les Animaux de Compagnie d’Espèces Domestiques (ACACED) ou ses équivalences[11].
Les autres animaux de compagnie courants tels que le hamster, l’axolotl ou le poisson rouge par exemple, peuvent être acquis sans formalité qui attesterait de la connaissance de l’espèce par le nouveau propriétaire.
Quant à l’acquisition d’animaux domestiques d’espèces dites de rente, elle implique l’accès automatique du propriétaire au statut d’éleveur. Il est donc réputé connaître l’espèce en question et doit se soumettre à l’ensemble des démarches et obligations qui incombent à tout éleveur (déclaration de l’élevage, identification, traçabilité, prophylaxie, etc.). Ainsi, si vous faites le choix d’adopter une vache pour la compagnie, vous êtes dans l’obligation de vous déclarer comme éleveur auprès des services compétents et votre animal devra notamment être identifié à l’aide de boucles auriculaires ou encore faire l’objet de prélèvements sanguins annuels dans le cadre de la prophylaxie bovine obligatoire.
Qu'en est-il des animaux sauvages ?
S’il paraît a priori possible d’adopter n’importe quel animal domestique et d’en faire son animal de compagnie, qu’en est-il de l’animal sauvage ? Pouvez-vous adopter le hérisson qui vit au fond de votre jardin, un moineau, ou encore un sanglier ?
Ce qui n’est pas domestique est sauvage
Par exclusion, tous les animaux non-domestiques sont considérés comme sauvages par le législateur. Ils n’existent cependant pas en tant qu’individus dans le droit français et sont traités dans le Code de l’environnement sous le terme de « faune sauvage » ou d’espèces sauvages. Cette terminologie est très représentative de l’approche qui est faite à ce jour de l’animal sauvage par le droit français : ce n’est pas l’individu en tant que tel mais l’espèce que l’on souhaite protéger dans son ensemble, pour des raisons de préservation de la diversité génétique notamment.
L’article R411-5 du Code de l’environnement précise ainsi que « Sont considérées comme espèces animales non domestiques celles qui n’ont pas subi de modification par sélection de la part de l’homme ».
En l’absence de la publication du décret censé préciser la liste des animaux de compagnie autres que les chats et les chiens[12], les nouveaux animaux de compagnie (NACs) peuvent provenir aussi bien d’espèces domestiques que sauvages. On parle, dans ce dernier cas, de « faune sauvage captive ».
A noter que la Convention européenne pour la protection des animaux de compagnie précise dans son préambule que « la détention de spécimens de la faune sauvage, en tant qu’animaux de compagnie, ne devrait pas être encouragée »[13]. Cette position revêt des considérations éthiques, environnementales mais aussi sanitaires.
Le saviez-vous ?
Les animaux d’espèces sauvages constituent de potentiels réservoirs d’agents pathogènes susceptibles de contaminer les espèces domestiques mais également l’humain : on estime ainsi que, sur les 335 maladies ayant émergé entre 1940 et 2004 dans le monde, il s’agirait pour la majorité de zoonoses[14] (60,3 %) dont 71,8 % auraient pour origine la faune sauvage[15].
L’acquisition d’un animal de compagnie issu d’une espèce sauvage
Première chose à savoir : il est interdit de capturer certains animaux dans la nature. Cela concerne :
- les espèces protégées, que ce soit à l’échelle de la France ou de l’Union Européenne[16] (ex : le hérisson d’Europe) ;
- les espèces exotiques envahissantes[17], dites EEE (ex pour le territoire métropolitain : le frelon asiatique, le ragondin ou encore la tortue de Floride),
- les espèces chassables[18].
A noter qu’il existe plusieurs exceptions à l’interdiction de prélèvement dans la nature de ces espèces, nécessitant des autorisations exceptionnelles. Elles concernent :
- Le désairage des rapaces, qui désigne le fait de capturer un jeune autour des palombes ou épervier, pourtant classés espèces protégées[19], afin de permettre l’exercice de la chasse au vol ;
- Le prélèvement pour les établissements d’élevage de gibier dont la chasse est autorisée. Les animaux qu’ils détiennent sont destinés directement ou par leur descendance à être introduits dans la nature ou ont une autre destination, notamment la production de viande[20] ;
- Le prélèvement à des fins de recherche et d’éducation, de repeuplement et de réintroduction de ces espèces et pour des opérations de reproduction nécessaires à ces fins[21] .
S’il existe quelques autorisations exceptionnelles de prélèvement dans la nature d’animaux d’espèces protégées, exotiques envahissantes et chassables, elles concernent des activités bien spécifiques (voir « Exceptions ») dont la simple compagnie ne fait pas partie ! Impossible donc, par exemple, de solliciter une autorisation pour prélever un chevreuil dans la nature pour en faire un animal de compagnie.
Le saviez-vous ?
Même le ramassage des escargots peut être encadré dans votre département ! Ainsi, l’Escargot de Bourgogne, le plus consommé en France, peut être ramassé seulement en dehors de sa période de reproduction (qui s’étend du 1er avril au 30 juin) et si le diamètre de sa coquille est au moins égal à 3cm[22] ! Si c’est deux conditions sont remplies, a priori rien ne vous empêche d’adopter un escargot de Bourgogne !
📌 Domestiques mais chassables[23] ?
Le canard colvert et le faisan figurent dans la liste des espèces considérées comme domestiques. Mais alors pourquoi sont-ils également chassés ?
En France, seules les espèces de gibiers listées dans l’arrêté du 26 juin 1987, régulièrement mis à jour, peuvent être chassées. Cela représente environ 90 espèces non-domestiques parmi lesquelles les faisans de chasse, le canard colvert, le lièvre, le chevreuil, le blaireau, le sanglier ou encore le renard.
En réalité, les populations de faisans ou de canards colverts considérées comme domestiques par l’arrêté du 11 août 2006 diffèrent des populations sauvages considérées comme chassables par l’arrêté du 26 juin 1987.
Il n’est donc possible de choisir pour colvert de compagnie, qu’un colvert issu de populations domestiques !
En d’autres termes, une grande partie des animaux sauvages qui vivent aux abords de chez nous sont concernées par ces interdictions de prélèvement. La seule possibilité de se procurer un individu d’espèces non-domestiques de manière licite consiste donc à se tourner vers un élevage déclaré.
La détention d’espèces sauvages non prélevées dans la nature est très encadrée
Pour être détenu pour la compagnie, l’animal d’espèce non domestique doit donc avoir une origine licite (c’est-à-dire provenir d’un élevage autorisé).
Il convient ensuite de se référer à l’arrêté du 8 octobre 2018[24] qui définit, en fonction de l’espèce et du nombre de spécimens détenus, le régime de détention qui s’applique : détention libre, soumise à déclaration ou à autorisation[25].
L’animal d’espèce non domestique peut ainsi :
- Être détenu en captivité sans formalité (colonne a de l’annexe 2 de l’arrêté susmentionné) ;
- Être soumis à déclaration (colonne b) : la déclaration est effectuée en ligne[26] avant l’acquisition du premier spécimen. Une fois validée, la Direction Départementale de la Protection des Populations (DDPP) du lieu de vie de l’animal adresse un récépissé de déclaration au futur propriétaire. Le récépissé doit normalement être présenté au cédant lors de l’acquisition de l’animal ;
- Être soumis à autorisation (colonne c). Également délivrée par la DDPP, elle concerne :
- D’une part, le propriétaire, automatiquement considéré comme éleveur, qui doit être titulaire d’un certificat de capacité pour l’entretien de ces animaux[27] attestant de sa connaissance approfondie et d’une expérience conséquente au contact de l’espèce en question ;
- D’autre part, le lieu d’hébergement des animaux, qui constitue automatiquement un établissement d’élevage et doit donc faire l’objet d’une autorisation d’ouverture préalable[28] .
Comment lire de l’annexe 2 de l’arrêté du 8 octobre 2018 ?
Exemple avec le Varan des savanes :
Nom scientifique (Nom vernaculaire) | Régime de détention en fonction du nombre de spécimens détenus | ||
(a) | (b) | (c) | |
Pas de formalité | Déclaration de détention | Certificat de capacité et autorisation d’ouverture | |
Varanus exanthematicus (Varan des savanes) | Sans objet | De 1 à 6 | 7 et plus |
Dans le cas présent, il n’est pas possible de détenir de Varan des savanes sans formalité. De 1 à 6 spécimens, une simple déclaration est requise. Au-delà, il convient de justifier d’un certificat de capacité pour l’élevage de Varan des savanes et d’une autorisation d’ouverture avant l’acquisition du premier individu.
A noter que les espèces exotiques envahissantes, pourtant interdites d’introduction en France, de détention, de transport, d’échange, de vente ou d’achat, figurent dans l’arrêté. C’est le cas par exemple pour la tortue de Floride, dont l’importation et la vente sont interdites depuis 1997[29], mais qui est mentionnée dans l’arrêté à la colonne c dès le premier individu détenu.
En effet, la loi prévoit que la détention de spécimens acquis avant l’entrée en vigueur de l’interdiction relative à l’espèce à laquelle ils appartiennent peut faire l’objet d’une exception et ainsi être, sous de strictes conditions[30], dispensée de certificat de capacité et d’autorisation d’ouverture. En d’autres termes, s’il est impossible de faire l’acquisition d’une tortue de Floride en France depuis 1997, les personnes s’en étant procuré avant cette date sont, sous certaines conditions, autorisées à les conserver sans nécessité de déposer une demande de certificat de capacité et d’autorisation d’ouverture.
Le saviez-vous ?
L’arrêté du 8 octobre 2018 impose de prévenir les évasions d’espèces qui pourraient créer des déséquilibres dans le milieu naturel. Parce qu’elles représentent une menace pour la faune et la flore locales, il est notamment interdit d’introduire dans le milieu naturel des spécimens d’une espèce exotique envahissante (EEE). Reprenons l’exemple de la tortue de Floride : l’introduction volontaire et sans autorisation d’un spécimen dans le milieu naturel est passible de 3 ans d’emprisonnement et 150 000 € d’amende[31]. Si l’introduction est involontaire, car survenue par négligence ou imprudence, l’auteur de l’infraction encourt une contravention de 4ème classe (750€)[32].
Autre subtilité, la détention d’un seul spécimen de sanglier (Sus scrofa) est, d’après l’arrêté du 8 octobre 2018, soumise à simple déclaration. Pourtant, les faits divers de particuliers ayant recueillis un marcassin orphelin et se voyant refuser sa garde par l’administration sont légion. En effet, comme précisé plus haut, le prélèvement dans la nature d’animaux d’espèces chassables est interdit. Ainsi, la détention d’un sanglier n’est conforme que si son origine est licite (élevage autorisé). Dans le cas où vous trouvez un animal de la faune sauvage en danger, il est donc impératif de contacter un centre de soins de la faune sauvage sous peine de voir la déclaration de détention refusée et l’animal euthanasié par les services de l’Etat.
Pour résumer, choisir pour animal de compagnie un animal d’espèce sauvage est une pratique possible mais très encadrée. Parce qu’ils appartiennent à des espèces chassables, protégées ou envahissantes, la plupart des animaux d’espèces sauvages qui vivent en liberté en France ne peuvent être prélevés dans la nature. Quant aux animaux ayant une origine licite, ils sont pour la plupart soumis, en fonction de l’espèce et du nombre de spécimens détenus, à des déclarations ou autorisations préalables.
Ces contraintes règlementaires ont pour but, d’une part, de garantir la liberté des animaux d’espèces sauvages vivant à l’état naturel ; d’autre part, de s’assurer que les personnes qui font l’acquisition d’un animal d’espèce sauvage né en élevage (origine licite) connaissent et sont en mesure de satisfaire ses besoins spécifiques, parfois très éloignés des besoins des animaux de compagnie les plus courants, ce qui est indispensable au bien-être de l’animal.
Conclusion
Si nous pensons tous au chien et au chat lorsqu’il est question d’animal de compagnie, il est intéressant de noter que, à ce jour, aucun texte ne liste précisément les espèces animales pouvant être considérées comme telles.
L’animal de compagnie est en effet défini par le droit comme l’animal qui n’a pas d’utilité économique et avec lequel on entretient un lien affectif unique. Plus que de faire référence à une espèce, ce statut semble donc s’appuyer sur la nature du lien spécifique entre un humain et un animal, lien réputé unique et irremplaçable.
Il est ainsi possible de choisir pour compagnon un animal parmi les espèces d’animaux domestiques, dont la liste est fixée par arrêté, ou bien parmi les espèces d’animaux sauvages. Ces dernières correspondent, par exclusion, à toutes les espèces d’animaux non domestiques. Cette classification conditionne notamment les règles de détention définies respectivement par le Code rural et de la pêche maritime et le Code de l’Environnement.
Malgré ces différences, les sanctions pénales initialement prévues pour sanctionner les auteurs de mauvais traitements à l’égard des animaux domestiques ont été étendues par décret du 7 septembre 1959 aux animaux sauvages apprivoisés ou tenus en captivité. Ainsi, qu’il soit d’espèce domestique ou sauvage, l’animal de compagnie placé sous la responsabilité de l’humain bénéficie donc de la même protection ! Cet ajustement illustre aussi et surtout le fait que la protection dont les animaux bénéficient est directement liée à la fonction à laquelle l’Homme les destine.
Pour résumer
Merci à Muriel FALAISE (Maîtresse de conférences en droit privé), Eric BARATAY (historien, spécialiste de l’histoire des relations hommes-animaux) et Adrien BONNOT (Inspecteur de l’Environnement, Référent Police-contrôle, Service départemental du Rhône OFB) pour leur contribution à cet article.
[1] Cette interprétation de la notion d’agrément est celle qui semble communément admise par les juristes. Par exemple, Lucille Boisseau-Sovinski souligne ainsi bien que l’utilité que les animaux ont pour l’Homme constitue l’un des premiers critères qui permet leur catégorisation juridique. Elle émet ainsi une distinction entre l’animal de compagnie et les animaux d’utilité économique, qui seraient les animaux « soumis aux pouvoirs de l’homme et présentant à son égard une utilité économique ». Elle poursuit : « Ainsi, tous les animaux générant un profit dans le cadre de l’activité professionnelle de leur maître pourraient être classés parmi les animaux représentant une utilité économique pour l’homme, à l’exclusion des autres ». Elle y inclut les animaux d’élevage, de spectacle, de travail ou d’expérimentation en excluant les chiens de garde, les chiens d’aveugles ou encore les chiens de chasse considérés par elle comme des animaux d’agrément. Voir Lucille Boisseau-Sovinsky. 2008. La désappropriation de l’animal.
[2] En effet, d’après Eric Baratay : “Dans le fait de tenir compagnie, il existe plusieurs degrés. Pour l’animal, il peut s’agir simplement d’être là sans qu’il existe beaucoup d’interactions entre le propriétaire et l’animal, ou il peut y avoir des interactions bien plus fortes, comme c’est le cas aujourd’hui avec le chien ou le chat : on joue, on lui parle, on le sollicite, etc. »
[3] Dans cet arrêt, il s’agit bien ici de la sensibilité humaine qui est protégée et non celle de l’animal. Est prise avant tout en considération par la Cour le lien d’affection que ressent le propriétaire pour son animal de compagnie. L’animal de compagnie n’est quelque part pas protégé pour lui-même. Le point de vue est donc anthropocentrique. Mais alors, est-ce que l’animal de compagnie subit son statut ? Pour Eric Baratay, les choses paraissent un peu plus complexes, puisque, si certains animaux ne se sont historiquement pas adaptés au compagnonnage (notamment certains animaux sauvages exotiques qui ont dépéri en captivité), il semble que la mise en place du lien avec un animal de compagnie dépend également de l’adhésion de ce dernier à la relation. Cela renvoie quelque part à la notion d’apprivoisement, sachant que la force du lien qui unit l’animal de compagnie à l’homme a tendu à augmenter avec les siècles. Ce phénomène est par exemple parfaitement illustré par l’histoire de la relation entre l’humain et le chat. Là où il y a quelques siècles, le chat était décrit dans la littérature comme indépendant, avec une recherche minimale d’interactions avec son propriétaire, Eric Baratay parle aujourd’hui de “chats-chiens”, qui tendent à solliciter davantage l’humain jusqu’à développer parfois certains troubles comme l’angoisse de séparation.
[4] Arrêté du 11 août 2006 fixant la liste des espèces, races ou variétés d’animaux domestiques : https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000000789087
[5] Arrêté du 25 octobre 1982 relatif à l’élevage, à la garde et à la détention des animaux : https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000000864910
[6] Pour en savoir plus sur la différence entre les chats errants et les chats libres, consultez notre article dédié : https://chaire-bea.vetagro-sup.fr/il-faut-laisser-les-chats-errants-vivre-leur-vie-vrai-ou-faux/
[7] Proposition de loi n°2361 visant à modifier le statut juridique du cheval en le faisant passer d’animal de rente à animal de compagnie
[8] Proposition de loi n°828, visant à modifier le statut juridique du cheval en le faisant passer d’animal de rente à animal de compagnie
[9] https://equipedia.ifce.fr/economie-et-filiere/economie/marche-et-commercialisation/les-usagers-hors-structure-chiffres-cles
[10] LOI n° 2021-1539 du 30 novembre 2021 visant à lutter contre la maltraitance animale et conforter le lien entre les animaux et les hommes (1)
[11] Retrouvez nos modèles de certificats ici. Article L214-6-1 du Code rural et de la pêche maritime
[12] Article L214-8 du Code rural et de la pêche maritime
[13] https://rm.coe.int/168007a684
[14] Les zoonoses sont des maladies infectieuses causées par des germes qui se propagent entre les animaux et les humains.
[15] Importance de l’implication de la faune sauvage dans les zoonoses émergentes ou résurgentes, Jones KE, Patel NG, Levy MA et al. Global trends in emerging infectious diseases. Nature. 2008;451:990-4
[16] https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F34977
Article L411-1 du Code de l’Environnement
https://eur-lex.europa.eu/FR/legal-content/summary/bern-convention.html
https://cites.org/sites/default/files/fra/app/2023/F-Appendices-2023-11-25.pdf
[17] Article L411-6 du Code de l’environnement
https://www.ecologie.gouv.fr/politiques-publiques/especes-exotiques-envahissantes et https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/documents/arretes_especes_exotiques_envahissantes_recapitulatif.pdf
[18] https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000000296288/2024-07-15/
[19] Arrêté du 29 octobre 2009 fixant la liste des oiseaux protégés sur l’ensemble du territoire et les modalités de leur protectionl
[20] Article R413-24 du Code de l’environnement
[21] Article L411-2 du Code de l’environnement
[22] Arrêté du 24 avril 1979 fixant la liste des escargots dont le ramassage et la cession à titre gratuit ou onéreux peuvent être interdits ou autorisés
[23] https://www.ofb.gouv.fr/les-especes-chassables
[24] Arrêté du 8 octobre 2018 fixant les règles générales de détention d’animaux d’espèces non domestiques
[25] Remarque : il est question ici des prérequis et connaissances dont il faut attester pour être autorisé à faire l’acquisition d’un animal d’une espèce donnée. L’article ne traite pas des autres documents obligatoires pour une acquisition en bonne et due forme (ex : identification, attestation de cession) ni des démarches obligatoires relatives à la détention de l’animal tout au long de sa vie (ex : registre d’entrées-sorties, suivi sanitaire, etc.).
[26]Formulaire 15967*01 : Déclaration de détention d’animaux d’espèces non domestiques
[27] Article L413-2 du Code de l’environnement
[28] Article L413-1 du Code de l’environnement
[29] RÈGLEMENT (CE) No 338/97 DU CONSEIL du 9 décembre 1996 relatif à la protection des espèces de faune et de flore sauvages par le contrôle de leur commerce
[30] Article R411-39 du Code de l’environnement
à retenir
- L’animal de compagnie est un compagnon détenu sans but économique
- A ce jour, la loi n’établit pas une liste exhaustive des animaux de compagnie : ils peuvent être d’espèces domestiques ou sauvages
- Selon l’espèce et le nombre d’animaux détenus, la détention peut être libre ou soumise à certificat d’engagement, déclaration voire autorisation
CHIFFRE CLÉ
Des Français considèrent leur chien ou leur chat comme un membre à part entière de la famille (Ipsos 2023)