
Florent Bouchard est éleveur de vaches laitières de race Montbéliarde dans le Rhône.
Installé avec son père depuis 2020, ils élèvent sur leur exploitation 70 vaches laitières.
Face aux sécheresses et aux fortes chaleurs, Florent Bouchard a dû repenser son élevage et mettre en place de nouvelles solutions pour l’adapter au changement climatique.
Dans cette vidéo, il présente quelques adaptations techniques et aménagements mis en place pour garantir le bien-être et la production de ses vaches.

On constate quand même que, passé les 30°C, ça devient compliqué de gérer le troupeau.

Florent Bouchard
Au programme
- 0:05 : Présentation du GAEC Bouchard
- 0:21 : Quels effets du changement climatique constatez-vous dans votre élevage ?
- 0:55 : Qu’avez-vous mis en place contre la hausse des températures ?
- 1:40 : Avez-vous d’autres pistes amélioration contre le stress thermique ?
- 2:13 : Et qu’avez-vous mis en place contre les sécheresses ?
- 2:51 : Comment palliez-vous le manque d’eau ? (notamment pour l’irrigation)
- 3:53 : Quel coût a un tel système ?
- 4:27 : Souhaitez-vous ajouter quelque chose sur ce sujet ?
- 5:09 : Certains agriculteurs pensent qu’élever moins de vaches sera la solution. Qu’en pensez-vous ?
Retranscription
Retranscription - Adaptations d'un élevage laitier face au changement climatique
Pouvez-vous vous présenter ?

Florent Bouchard
Je m’appelle Florent Bouchard et je suis installé avec mon père au GAEC Bouchard depuis 2020. Nous exploitons 120 hectares et élevons actuellement environ 70 vaches laitières, pour une référence de 600 000 litres de lait.
Quels effets du changement climatique constatez-vous dans votre élevage ?

Florent Bouchard
On a très vite été confrontés aux sécheresses. On est dans une zone très séchante, avec des sols peu profonds ou sableux qui retiennent très peu l’eau. L’herbe est de moins en moins riche sur le plan nutritif, et on se rend compte qu’on fait de moins en moins de lait au fil du temps.
On essaie de compenser par plein de choses, en apportant des innovations, mais malgré tout, on a du mal à produire autant qu’il y a dix ans, parce que le climat a changé.
Qu'avez-vous mis en place contre la hausse des températures ?

Florent Bouchard
On élève des vaches de race Montbéliarde, c’est une race qui supporte plutôt bien la chaleur, puisqu’on la retrouve dans beaucoup de pays chauds. On peut dire qu’en France, on a un petit avantage avec nos Montbéliardes !
Mais on constate quand même que, passé les 30 °C, ça devient difficile de gérer le troupeau. On a donc mis en place plusieurs aménagements : des brumisateurs pour rafraîchir les vaches à partir de 15 h, et un bâtiment très ouvert, orienté est avec un filet brise-vent à l’ouest qu’on peut ouvrir selon les besoins. En été, c’est un peu comme un grand parasol, avec des entrées d’air de chaque côté pour garder un flux d’air constant.
Avez-vous d'autres pistes amélioration contre le stress thermique ?

Florent Bouchard
On sait qu’à l’avenir, on pourra encore améliorer les choses, par exemple en installant des ventilateurs ou des systèmes de brumisation plus performants que ceux qu’on a aujourd’hui. Mais ces adaptations ont un coût important. Rien que pour trois ventilateurs, on a eu un devis à plus de 20 000 €.
On préfère donc intégrer ce type d’investissement dans un projet à moyen terme, sur les cinq prochaines années. On avait aussi envisagé d’isoler le toit du bâtiment, mais le coût était trop élevé, donc on a dû abandonner l’idée pour l’instant, même si ce serait l’idéal pour réduire la chaleur.
Et qu'avez-vous mis en place contre les sécheresses ?

Florent Bouchard
On essaie déjà d’agir sur plusieurs leviers, notamment les rotations de culture. On alterne une année de céréales, deux à trois ans de prairie, puis une année de maïs quand c’est possible. On fait aussi très attention aux variétés qu’on choisit : on se renseigne beaucoup pour sélectionner celles qui résistent le mieux à la sécheresse, notamment pour le maïs.
Mais le levier principal reste l’irrigation. On a dû la développer sur l’exploitation : il y a dix ans, on arrosait à peine un hectare, aujourd’hui on irrigue environ 15 hectares de maïs ensilage et 4 à 5 hectares de luzerne pour rester autonomes.
Comment palliez-vous au manque d'eau ? (notamment pour l'irrigation)

Florent Bouchard
Il y a deux ans, on a créé une retenue d’eau de 40 000 m³ avec la CUMA de Pollionnay. C’est un groupement d’agriculteurs, où on est une quinzaine à une vingtaine de fermes, qui permet de mutualiser le matériel et de réduire les coûts de mécanisation.
Le principe de notre retenue collinaire est simple : elle récupère uniquement les eaux de ruissellement sur environ 60 à 70 hectares de bassin versant. On ne pompe pas dans les nappes phréatiques, on stocke uniquement les eaux pluviales de l’hiver, quand il y en a en excès.
L’idée, c’est de stocker l’eau quand elle est disponible pour pouvoir l’utiliser l’été. Cela a deux avantages : limiter les risques d’inondation lors des gros orages et assurer l’irrigation en période sèche.
On n’utilise pas cette eau pour abreuver les vaches laitières afin d’éviter tout risque sur la qualité du lait. L’objectif principal, c’est d’assurer la culture du maïs, car nos vaches, en période de forte chaleur, ont besoin d’un apport énergétique important, et cet apport, on le trouve surtout dans le maïs.
Quel coût a un tel système ?

Florent Bouchard
Rien que pour la création de la retenue, on a une annuité d’environ 10 000 € à rembourser chaque année. À cela s’ajoute le coût de l’électricité pour faire fonctionner la pompe qui envoie l’eau jusqu’à l’arroseur. Sur une saison, ça représente autour de 4 000 €. Ce n’est pas négligeable, même si notre système reste plutôt économe.
On a la chance d’avoir nos parcelles juste à côté de la retenue, ce qui limite les pertes et les frais liés au transport de l’eau. En termes de consommation, on est donc vraiment au plus bas possible.
Souhaitez-vous ajouter quelque chose sur ce sujet ?

Florent Bouchard
Les écologistes nous disent souvent qu’il faut arrêter les cultures d’été parce qu’elles consomment trop d’eau, que c’est une bêtise. Mais en réalité, non. Tous les orages en été viennent en grande partie des cultures d’été comme le maïs ou le sorgho. Ce sont ces plantes, avec l’évapotranspiration, qui participent à la création de la pluie.
Si on arrête d’arroser et qu’on supprime ces cultures qui transpirent l’été, on aura de moins en moins de pluie à cette période, et on accentuera le phénomène. On aura alors de plus en plus d’orages violents à l’automne qui ravagent tout. Et puis, on laisse partir l’eau trop vite à la mer, et une fois qu’elle y est, c’est trop tard. C’est bien dommage de ne pas pouvoir la stocker avant.
Certains agriculteurs penses qu'élever moins de vaches sera la solution. Qu'en pensez-vous ?

Florent Bouchard
Réduire le cheptel, ce n’est pas une solution. Beaucoup disent que c’est plus économique d’acheter moins et d’avoir moins de vaches, mais ce n’est pas durable. Si ça s’arrête au dernier exploitant, il n’y aura pas de reprise.
Il faudrait installer des jeunes et essayer de maintenir au moins les troupeaux existants. Aujourd’hui, il n’y a pas ou très peu de repreneurs, ce qui sera dramatique, surtout sur des terrains très vallonnés comme ici, où l’élevage reste le seul moyen de les entretenir.
à retenir
- Le changement climatique impacte les élevages laitiers : la chaleur affecte les vaches et la sécheresse touche les cultures.
- Face aux épisodes de chaleur et de sécheresse de plus en plus fréquents, les élevages laitiers doivent s’adapter pour maintenir leur production.
- Parmi ces adaptations, l’aménagement des bâtiments et l’installation de systèmes de ventilation ou de brumisation favorisent le bien-être du troupeau, tandis qu'une retenue collinaire a été mise en place pour irriguer les cultures.
- Cette retenue collinaire permet de récupérer les eaux de ruissellement l'hiver, qui sont stockées puis utilisées l'été.

On constate quand même que, passé les 30°C, ça devient compliqué de gérer le troupeau.

Florent Bouchard




