
À la Ferme de la Grignette, Camille Stouls élève 900 poules pondeuses en pleine forêt !
Dans cette vidéo, nous abordons le fonctionnement de son élevage, ses méthodes de production en agriculture biologique, les choix qu’elle fait pour le bien-être de ses poules et les défis auxquels elle est confrontée au quotidien.
Elle nous explique aussi comment elle organise ses bâtiments, gère les lots et assure une ponte optimale tout en maintenant un modèle économique viable !
Pour en savoir plus sur l’élevage en pleine forêt, retrouvez notre première vidéo à ce sujet ici : Élever des poules pondeuses en pleine forêt !

Il me faudrait un bâtiment en plus mais comme on fait tout à la main, aujourd’hui, je n’ai pas envie. Je réfléchis plutôt à la diversification de mon activité.

Camille Stouls
Au programme
- 0:19 : Pouvez-vous présenter votre élevage ?
- 0:57 : Pourquoi prioriser le bien-être des poules dans votre élevage ?
- 1:29 : Utilisez-vous des races rustiques ?
- 1:57 : Combien de temps gardez-vous vos poules pondeuses ?
- 2:20 : Où vendez-vous vos œufs ?
- 2:45 : Votre élevage est-il économiquement viable ?
- 3:32 : Rencontrez-vous une difficulté en particulier dans votre métier ?
- 4:52 : Pour aller plus loin : la conduite d’élevage de poules pondeuses
Retranscription
Retranscription - Un élevage de poules pondeuses en pleine forêt !
Pouvez-vous présenter votre élevage ?

Camille Stouls
Je suis Camille Stouls, et nous sommes à la Ferme de la Grignette !
Je n’ai pas toujours été agricultrice. Le projet est né il y a quelques années maintenant, et la ferme existe depuis trois ans.
C’est un élevage uniquement de poules pondeuses, en agriculture biologique. Aujourd’hui, j’ai quatre bâtiments avec 300 poules par bâtiment, mais je ne garde que 900 poules à la fois. J’ai toujours trois bâtiments remplis et un bâtiment vide, ce qui me permet d’effectuer des vides sanitaires sur une période plus longue que quelques semaines.
C’est quelque chose que j’ai vraiment voulu mettre en place, car le fait d’être en flux tendu, avec tout le temps des animaux dans les bâtiments, rend les choses compliquées au niveau sanitaire. C’est difficile de rompre les cycles des parasites, mais aussi de permettre au végétal de se renouveler.
Pourquoi prioriser le bien-être des poules dans votre élevage ?

Camille Stouls
Aujourd’hui, la moyenne en France, je crois que c’est autour de 30 000 poules par élevage. Ce sont des bâtiments entièrement automatisés, où une seule personne peut gérer jusqu’à 6 000 poules. C’est comme ça qu’on arrive à avoir des œufs à 1,50 € ou moins de 2 € les six.
Moi, en agriculture biologique, avec un petit cheptel comme le mien, mes prix doublent. Du coup, pour compenser, je suis obligée d’avoir en permanence un taux de ponte élevé et donc d’assurer le bien-être des poules, puisque le bien-être animal va de pair avec une bonne production.
Utilisez-vous des races rustiques dans votre élevage ?

Camille Stouls
Quand on fait uniquement de la poule pondeuse, c’est difficile de travailler avec des races rustiques. Elles pondent moins et ne deviennent intéressantes que si on les valorise ensuite en chair, ce que je ne fais pas, puisque je produis uniquement des œufs.
Mon objectif, c’est donc d’assurer une bonne production, parce que pour être rentable, il faut tout de même un certain volume. Aujourd’hui, la poule pondeuse rousse reste la plus performante pour ce type d’élevage.
Combien de temps gardez-vous vos poules pondeuses ?

Camille Stouls
J’accueille mes poules à partir de 18 semaines. La plupart des éleveurs les gardent environ 12 mois, donc elles partent à un an et demi. Je trouvais que c’était vraiment peu, alors j’ai choisi de les garder 18 mois en production.
Au bout de ces 18 mois, elles sont réformées, mais je ne les envoie pas à l’abattoir. Elles ne pondent plus assez pour que ce soit viable économiquement pour moi, mais pour des particuliers, c’est parfait !
Où vendez-vous vos œufs ?

Camille Stouls
Je fais environ un tiers de ma production en vente directe, sur les marchés et en AMAP. L’AMAP, c’est une association pour le maintien de l’agriculture paysanne, qui permet de créer un lien direct entre les consommateurs et les producteurs.
À côté de ça, je travaille aussi avec des épiceries, principalement bio et locales, puisque ma production est en bio, ainsi qu’avec des boulangeries bio. Et puis, à la marge, je vends aussi à quelques restaurants.
Votre élevage est-il économiquement viable ?

Camille Stouls
C’est un élevage avec un modèle un peu fragile, dans le sens où, avec 900 poules, je pense qu’on est vraiment à la limite pour s’en sortir et dégager un revenu minimum pour une personne. Quand tout va bien, ça va, mais dès qu’il y a un souci, c’est de la perte pure.
Il me faudrait un bâtiment de plus, mais comme on fait tout à la main, je n’en ai pas envie pour le moment. Je réfléchis plutôt à de la diversification. J’ai commencé à faire pousser des champignons dans ma cave, et on est en train de se faire labelliser “Accueil Paysan” parce qu’on a un petit gîte.
L’idée, c’est de rajouter de petites activités pour avoir une autre source de revenus en cas de problème sur l’élevage. Je pense que c’est la clé, d’ailleurs : la polyculture-élevage, c’est ce qui permet à beaucoup de fermes de tenir aujourd’hui.
Rencontrez-vous une difficulté en particulier dans votre métier ?

Camille Stouls
Aujourd’hui, en France, il existe une réglementation concernant la salmonelle. On nous demande de prélever, dans la litière des bâtiments, au sol, de la poussière qu’on envoie ensuite au laboratoire toutes les quinze semaines. S’il y a une des trois salmonelles recherchées qui est trouvée, on nous demande d’arrêter de vendre nos œufs et d’abattre nos poules.
Sur des petits élevages, on a malheureusement très peu d’aides pour faire face à ça. Beaucoup de petits paysans ont dû arrêter après un contrôle positif, parce qu’ils n’ont pas réussi à s’en remettre. Ce qui est complètement fou, c’est que le prélèvement dans la litière ne veut pas forcément dire qu’il y a de la salmonelle dans la poule, et encore moins dans l’œuf.
La salmonelle, elle, est naturellement présente dans l’environnement extérieur : on peut en trouver dans l’estomac des rongeurs, des amphibiens ou des petits reptiles. Et pourtant, nous, on est très contraints et très exposés à cause de cette réglementation, alors que ce n’est pas le cas pour les élevages en cage ou entièrement à l’intérieur.
Ce qu’on demande, c’est qu’il y ait plutôt un prélèvement effectué directement sur les œufs, ou au minimum sur les poules, pour vérifier si la salmonelle peut réellement arriver jusqu’au consommateur avant de devoir abattre toutes nos volailles. Aujourd’hui, cette réglementation met clairement en danger toute la filière.
Pour aller plus loin : la conduite d'élevage de poules pondeuses

Camille Stouls
On reçoit les poules quand elles ont entre 17 et 18 semaines. Elles sont élevées dans un élevage de poulettes et on les reçoit juste avant qu’elles se mettent à pondre. On pourrait aussi démarrer avec des poussins d’un jour, mais c’est une technique qui n’est pas très développée et qui est assez sensible techniquement. Cette période est vraiment importante, car il faut que la poule prenne du poids régulièrement sur les 18 premières semaines. Si cette étape est ratée, toute la ponte peut être affectée, avec un risque d’avoir une production inférieure à ce qu’on souhaiterait normalement. Dans la filière, ça reste un métier à part.
L’ovosexage a complètement bouleversé la filière. Cela a mis fin à beaucoup d’accouveurs et de petits paysans, car ils ne peuvent pas ovosexer eux-mêmes, les machines coûtant plusieurs centaines de milliers d’euros. Cela a modifié les sources d’approvisionnement et créé de grosses difficultés, surtout en bio. Il faut aujourd’hui anticiper six mois à l’avance pour remplacer les lots.
À l’intérieur des bâtiments, on a des mangeoires. Dans certains élevages, on donne l’aliment à heures fixes et on attend que la mangeoire soit vide. Moi, comme je porte des seaux, je préfère donner un peu tous les jours, ce qui permet aux poules d’avoir toujours à manger. Elles ont aussi des abreuvoirs et des perchoirs, éléments essentiels pour qu’elles puissent se coucher la nuit. Les poules sont assez intelligentes pour garder une zone sèche et subvenir à leur besoin de bain de poussière, qui leur permet de se débarrasser des parasites.
Ensuite, il y a les pondoirs. L’objectif est de leur apprendre à pondre dans les pondoirs. On ramasse tous les œufs qui se trouvent au sol, car les poules font du mimétisme : si elles voient un œuf au sol, elles auront envie de pondre au sol. Les deux premiers mois de ponte sont donc cruciaux, car il faut identifier celles qui pondent par terre, les prendre et les mettre dans les nids. J’ai aussi commencé à installer des caillebotis devant les pondoirs pour qu’elles puissent y accéder plus facilement et y pondre plus régulièrement, car j’ai remarqué qu’elles préfèrent souvent pondre en hauteur.
à retenir
- Avec 900 poules pondeuses élevées en agriculture biologique, le bien-être des poules est primordial pour assurer une bonne production.
- Les poules pondeuses sont gardées 18 mois en production puis sont réformées et adoptées par des particuliers.
- La réglementation sur la salmonelle oblige les éleveurs à arrêter les ventes et abattre les poules si des traces sont détectées dans la litière, ce qui peut grandement fragiliser les petits éleveurs.

Il me faudrait un bâtiment en plus mais comme on fait tout à la main, aujourd’hui, je n’ai pas envie. Je réfléchis plutôt à la diversification de mon activité.

Camille Stouls




