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Les animaux utilisés en expérimentation finissent leur vie en laboratoire, VRAI ou FAUX

FAUX

Contrairement à ce que l’on pourrait croire, les animaux utilisés à des fins scientifiques ne sont pas toujours mis à mort en fin d’étude. En effet, la réglementation (européenne et française) autorise le placement de ces animaux sous certaines conditions.

à retenir

On vous en dit plus avec ce reportage vidéo, suivi d’un texte d’explication !

Devenir des animaux utilisés à des fins scientifiques

Une grande variété d’études font intervenir des animaux :  études de recherche fondamentale, études toxicologiques et règlementaires, recherche appliquée, études visant à la préservation des espèces…  Toutes les études ne sont pas invasives et certaines peuvent même consister simplement à tester l’appétence d’un nouvel aliment pour animaux avant sa commercialisation. 

Chacun des projets scientifiques impliquant l’utilisation d’animaux doit faire l’objet d’une demande d’autorisation auprès du Ministère de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche et de l’Innovation (MESRI), après avoir obtenu l’avis positif du comité d’éthique auquel est rattaché l’établissement demandeur. Parmi les nombreuses informations que doivent préciser les autorisations de projet, celles-ci doivent faire figurer le nombre d’animaux impliqués, ainsi que le devenir des animaux en fin de projet. 

Un animal utilisé à des fins scientifiques a trois devenirs possibles : 

  • Mise à mort
  • Réutilisation dans une autre étude expérimentale 
  • Placement  

Le devenir de l’animal est décidé en fonction de son état de santé, du risque pour la santé publique, de différents critères éthiques et également au regard des autres possibilités de devenir. 

Le saviez-vous ?

Pour l'heure, aucune source ne permet de donner de chiffre précis sur le taux d'animaux replacés.

Différentes enquêtes permettent d’avoir des données chiffrées sur les espèces d’animaux utilisées, sur le type des études qui sont conduites, sur le niveau de gravité des procédures ou encore sur le nombre d’animaux réutilisés dans d’autres études. Toutefois, il n’y a pas d’information sur le nombre d’animaux replacés dans ces enquêtes, et, à notre connaissance, aucune source ne permet de connaître le taux d’animaux replacés à ce jour. L’association GRAAL, qui œuvre au placement d’animaux utilisés à des fins scientifiques, renseigne que plus de 6 000 animaux ont été placés via leurs services et depuis leur début d’activité en 2005[1].  

Une législation qui permet le placement des animaux au nom de leur bien-être

Le placement (on parle également parfois de replacement, réhabilitation ou retraite) des animaux utilisés à des fins scientifiques en foyer est permis par la réglementation[2]. Cette réglementation vise le « remplacement total des procédures appliquées à des animaux vivants à des fins scientifiques et éducatives, dès que ce sera possible sur un plan scientifique ». C’est-à-dire que l’objectif est de remplacer, dès que possible, l’utilisation des animaux à des fins scientifiques par des alternatives sans utilisation d’animaux. Les alternatives doivent être fiables et validées pour chaque étude scientifique en question. Différentes techniques ont déjà été développées (ex : utilisation de modèles in vitro) pour diminuer le nombre d’animaux utilisés. 

Pour les études scientifiques ne bénéficiant pas d’alternative, la réglementation encadre l’utilisation des animaux ainsi que leur replacement sous certaines conditions. Selon l’espèce concernée (animaux de compagnie : chien, chat, rongeur… ; animaux d’élevage : vaches, moutons, … ; animaux sauvages : primates…), cela peut être dans un foyer, un système d’élevage adapté à l’espèce, un refuge ou encore dans leur habitat naturel pour certaines espèces sauvages. 

Pour cela, certaines conditions doivent être remplies : 

  • état de santé de l’animal permettant son placement,
  • pas de danger pour la santé publique, la santé animale ou l’environnement (ex : l’animal ne doit pas avoir été infecté avec un agent pathogène transmissible), 
  • mesures appropriées pour préserver le bien-être de l’animal[3].

Par ailleurs, pour éviter aux animaux des « angoisses inutiles », « garantir la sécurité publique » et assurer la réussite de l’opération, les établissements qui souhaitent placer les animaux doivent disposer d’un programme de socialisation ou de réadaptation dans le cas d’un animal sauvage relâché dans son habitat[4]

Le replacement des animaux de laboratoire : un 4ème R ?

Le placement des animaux utilisés à des fins scientifiques est un principe qui s’ajoute à la règle des 3R (Remplacer, Réduire, Raffiner), et est parfois considéré comme un 4ème R (Replacement/Retraite…). 

La règle des 3R a été élaborée en 1959 par Russel et Burch.

  • Remplacement : l’utilisation d’animaux doit être remplacée par d’autres méthodes lorsque c’est possible, sans que cela ne détériore la qualité de la recherche. 
  • Réduction : le nombre d’animaux utilisés pour chaque projet doit être réduit au maximum, tout en permettant de parvenir aux objectifs visés. 
  • Raffinement : les pratiques mises en place (conditions d’élevage, hébergement, soins, méthodes utilisées) doivent permettre de réduire le plus possible toute douleur, souffrance, angoisse ou dommage durables que pourraient ressentir les animaux. 

Le saviez-vous ?

Selon un sondage Ipsos publié en 2021 :

 - 5% des français disent connaître la règle des 3R (remplacer, réduire, raffiner)

 - 11% des français disent connaître précisément les comités d'éthique en expérimentation animale et les structures chargées du bien-être animal

 

Les français semblent mal connaître la règlementation qui protège les animaux utilisés à des fins scientifiques.

Qui encadre et comment se passe le replacement ?

Afin que le placement se passe dans de bonnes conditions, la préparation de l’animal est une étape très importante. Les conditions d’hébergement en laboratoire sont en effet bien particulières, et, même si de nombreux efforts sont faits en termes d’enrichissement et de socialisation des animaux, l’environnement du laboratoire reste souvent bien différent de l’environnement que l’animal connaitra après son placement et des situations nouvelles qu’il va rencontrer. La préparation du placement permet que celui-ci se passe au mieux. Par exemple, il est possible, dans le cadre d’un placement futur, d’apprendre aux chiens les bases de l’éducation canine, comme à marcher en laisse par exemple afin de faciliter la transition dans leur nouvelle vie.

Au sein de chaque établissement, c’est la Structure chargée du Bien-Etre des Animaux (SBEA), qui se charge d’apporter des conseils sur les programmes de placement des animaux. La SBEA est une structure obligatoire au titre de la directive européenne 2010/63/UE et du décret 2013-118 (Art. R. 214-103 du Code Rural). 

Le saviez-vous ?

Chaque SBEA doit être composée au minimum du responsable du bien-être animal du laboratoire et doit recevoir les conseils du vétérinaire désigné du laboratoire. Les SBEA des établissements utilisateurs doivent également comporter au moins un concepteur, c'est-à-dire une personne qui a été formée aux bonnes pratiques en expérimentation animale pour la conception ou la réalisation de procédures expérimentales.

 

En plus de leur rôle de conseil pour les programmes de placement des animaux, ces structures ont pour rôle de conseiller le personnel sur la prise en charge des animaux et l'application des 3R, mais aussi d'établir et de réviser les processus opérationnels internes, suivre l'évolution et les résultats des projets menés ou encore échanger des informations avec les responsables de projets (modifications potentielles de projets).

En France, le placement ou la mise en liberté d’animaux ayant été utilisés à des fins scientifiques peuvent être autorisés par le préfet du département du lieu de placement ou du lieu de mise en liberté (Art R214-112 du Code rural et de la pêche maritime). En pratique, le laboratoire doit faire une demande auprès de la DDPP (Direction Départementale de la Protection des Populations) inspectant le laboratoire et qui se mettra ensuite en lien avec la DDPP d’accueil des animaux.  

Certaines associations œuvrent au placement des animaux utilisés à des fins scientifiques. C’est par exemple le cas du GRAAL qui a contribué à placer des centaines d’animaux. Afin d’aider les laboratoires dans la démarche de placement, le GRAAL, en partenariat avec la Direction générale de l’Alimentation (DGAl), a par ailleurs réalisé un guide de la retraite des animaux de laboratoire. Le GRAAL n’est pas un centre d’accueil mais joue un rôle de facilitateur entre les différents acteurs afin de contribuer au placement des animaux utilisés à des fins scientifiques. Le GRAAL accompagne les laboratoires dans leurs démarches de placements des animaux et sélectionne des lieux d’accueil pour ces animaux. Les animaux peuvent être placés directement chez des adoptants (particuliers), dans des refuges gérés par d’autres associations de protection animale (ex : SPA) en attendant d’être adoptés par des particuliers, ou dans des refuges spécialisés qui permettent l’accueil des espèces concernées (ex : La Hardonnerie). 

Si vous souhaitez adopter un animal ayant été utilisé à des fins scientifiques, n’hésitez pas à vous rendre sur le site internet du GRAAL, qui vous mettra en relation avec des refuges proches de chez vous !

Certains laboratoires sont autonomes dans les démarches de placement du début à la fin et ne passent pas par l’intermédiaire d’une association. C’est par exemple le cas de Biovivo, un laboratoire de recherche se trouvant sur le site de VetAgro Sup, qui propose régulièrement à l’adoption des animaux, en passant d’abord par les réseaux de communication de Vetagro Sup. De nombreux animaux (chiens, chats, équidés…) ont ainsi déjà été adoptés. Par ailleurs, à l’inverse du GRAAL qui a fait le choix de privilégier les structures (SPA, refuge), Biovivo passe systématiquement par des familles d’accueil (la plupart du temps des étudiants de VetAgro Sup) pour les chiens avant de les proposer à l’adoption. 

Pour conclure

Finalement, même si l’on n’arrive pas à se passer pour l’instant de l’utilisation d’animaux pour arriver à certains nouveaux résultats scientifiques, de nombreux efforts sont faits, sur différents plans, pour mieux prendre en charge leur bien-être. Certains d’entre eux peuvent même être replacés et connaître une nouvelle vie après leur utilisation en laboratoire. Au-delà des améliorations des conditions de vie en laboratoire et des possibilités de placement des animaux utilisés à des fins scientifiques, l’objectif à long terme est de se passer totalement de leur utilisation.

En résumé

[1]Chiffre avancé par Marie-Françoise Lheureux dans son interview

[2] (« Directive 2010/63/UE du Parlement européen et du Conseil du 22 septembre 2010 relative à la protection des animaux utilisés à des fins scientifiques») (transposée dans la réglementation en 2013)

[3] (« Article R214-112 – Code rural et de la pêche maritime – Légifrance »)

[4] (« Article R214-112 – Code rural et de la pêche maritime – Légifrance »)

à retenir

CHIFFRE CLÉ

03

Un animal utilisé à des fins scientifiques a trois devenirs possibles : mise à mort, réutilisation dans une autre étude expérimentale et placement

Le Code rural incite réellement, au travers des structures chargées du bien-être animal, et ce à chaque fois qu’un protocole est mis en place, à réfléchir à la possibilité de donner une seconde vie derrière aux animaux

SAMUEL VIDAL, responsable du bien-être animal à Biovivo