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Web Agri – L’éthologie appliquée à l’élevage : plus de temps, de sécurité et de plaisir

par Delphine Jeanne

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Si la question du bien-être animal est prégnante dans les débats actuels, les éleveurs n’ont pas attendu les injonctions sociétales pour se former et améliorer le confort de leurs animaux. Néanmoins, les apports de l’éthologie mériteraient d’être davantage vulgarisés pour une meilleure compréhension du comportement des animaux et, au final, des gains de temps, de productivité, de sécurité et de plaisir au travail.

Discipline scientifique, l’éthologie, qui étudie le comportement des espèces animales, peut apporter de nombreuses pistes aux éleveurs dans leur quête d’amélioration du bien-être de leurs animaux. Or, ces notions clés de comportement animal manquent encore fortement dans les formations agricoles.

« La prise en compte du comportement est un outil indispensable en élevage », rappelle ainsi Pauline Garcia, éleveuse de bovins allaitants, comportementaliste animalier depuis 10 ans. Le 9 février, elle est intervenue, aux côtés de Luc Mounier, vétérinaire en charge de la formation Bien-être/comportement à VetAgroSup, et responsable de la chaire Bien-être animal, au webinaire organisé sur cette thématique par l’Association française des journalistes agricoles (Afja).

Si la question du bien-être animal est sur toutes les lèvres, il n’est pas inutile de rappeler la définition de l’Anses : « le bien-être de l’animal correspond à l’état mental et physique positif lié à la satisfaction de ses besoins physiologiques et comportementaux, ainsi que de ses attentes. Cet état varie en fonction de la perception de la situation par l’animal ».

Pour Pauline Garcia, les besoins fondamentaux du bovin, animal peureux, doivent nécessairement être connus de l’éleveur qui se doit d’y répondre sur la ferme. Ils se résument par une vie sociale riche, une alimentation diversifiée et en quantité suffisante, un point d’eau permettant à plusieurs individus de boire, des abris naturels ou artificiels, des supports de grattage, et une zone poussiéreuse.

Le comportement de l’éleveur influence celui des animaux

Au-delà de cet environnement immédiat, il ne faut pas négliger le rôle crucial du comportement de l’éleveur. « L’animal est souvent le reflet du comportement de l’humain, mais il n’est pas toujours évident de se remettre en question », explique Pauline Garcia. Ainsi, le pourcentage de taureaux qui attaquent ou montrent des signes d’opposition est plus faible quand l’éleveur est serein, sûr de lui, que quand il est plus anxieux, moins expérimenté ou plus sanguin.

Si les éleveurs sont tous sensibilisés à ces problématiques, « ils n’ont pas forcément conscience des traces qu’ils laissent dans la mémoire des animaux. Or, si on multiplie les interactions négatives pendant plusieurs années, on s’expose à des accidents », poursuit la comportementaliste. Si l’environnement joue un rôle dans le bien-être animal, ce sont surtout « les pratiques relationnelles qui influencent le comportement des animaux », ajoute-t-elle. Il s’agit, par exemple, de diluer le négatif avec du positif : lorsque l’on doit attacher la vache au cornadis pour un soin, on peut gratter l’animal en même temps, lui donner un peu de nourriture… De même, puisque les vaches associent les brosses installées à proximité à quelque chose d’agréable, si parfois c’est l’éleveur qui tient la brosse, il sera lui aussi associé à un sentiment agréable.

Anxiété, rythme de l’activité… : quelques signes à repérer

Au final, la connaissance du comportement normal d’un animal est le meilleur instrument pour adapter sa pratique et réagir le plus tôt possible. Plusieurs points d’attention ont été évoqués en ce sens par Luc Mounier :

  • Repérer les situations de mal-être, de stress, en identifiant certains signes : la présence de sillons autour des yeux (plus ils sont nombreux, plus il y a d’inconfort), les oreilles en arrière et le regard figé, synonymes d’anxiété… Et ensuite, améliorer les pratiques, par exemple mettre à disposition un abreuvoir assez grand pour éviter une situation de compétition entre les individus.
  • Repérer l’apparition de comportements anormaux : par exemple, un jeu de langue sur un veau de boucherie, indiquant le manque de matériaux manipulables, de stimulus.
  • Être attentif à la modification du rythme de l’activité. Une vache doit, en temps normal, rester couchée 12h. Si elle a un problème, elle se couchera moins, ou plus. Aujourd’hui, l’éleveur peut compter sur la médecine connectée pour mieux surveiller ses animaux et détecter les modifications de rythme.

« Ce diagnostic précoce est d’autant plus essentiel, que le bien-être animal est étroitement lié au bien-être humain », rappelle ainsi le vétérinaire, évoquant le concept « One welfare »

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Les Echos – L’agroalimentaire s’attaque au défi du bien-être animal

Au-delà de la dimension éthique, le bien-être animal est un enjeu commercial, d’image mais aussi de performance économique mobilisant une foule de technologies dont l’intelligence artificielle. La question de l’acceptation du surcoût par les consommateurs reste en suspens.

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Par Emmanuel Guimard – Publié le 26 janv. 2021

L’histoire s’accélère autour du vaste enjeu du bien-être animal. L’Assemblée nationale examine ce mardi une proposition de loi de la majorité sanctionnant la maltraitance des animaux domestiques et des équidés.

Par ailleurs, un nouveau décret imposera à partir du 1er janvier 2022 la nomination d’un référent bien-être animal dans chaque élevage. « Cela impliquera un important travail d’accompagnement », note Luc Mounier, directeur des formations de VetAgro Sup, à Lyon, et responsable d’une chaire oeuvrant depuis 2001 sur le bien-être animal. « C’est un sujet sociétal vers lequel l’ensemble des acteurs, et pas seulement les éleveurs, ont l’obligation d’aller », ajoute Raphaël Guatteo, enseignant-chercheur à l’école vétérinaire nantaise Oniris.

Cinq libertés fondamentales

Le bien-être animal ou «BEA», rappelle ce vétérinaire, correspond aux cinq libertés fondamentales que sont : l’accès à l’eau et à la nourriture, le fait de ne pas souffrir d’inconfort, celle de prévenir douleurs, blessures et maladies, de ne pas éprouver de peur ou de détresse, et enfin la possibilité qu’ont les animaux d’exprimer les comportements naturels propres à leur espèce.

L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) propose une définition plus englobante encore, se rapprochant de la notion de « welfare », en anglais. Pour mesurer objectivement ces critères dans la volaille, le groupe Terrena, pionnier en la matière, s’est doté dès 2015 d’un outil d’auto-évaluation avec l’application Tibena, décliné en 12 paramètres. Le principe a été repris par l’Itavi, l’institut technique oeuvrant pour la filière avicole avec son protocole baptisé «Ebene».

Pondeuses à la retraite

Aucun acteur ne le nie : au-delà de la question éthique, l’enjeu est économique. L’évolution soudaine du marché des oeufs coquilles en témoigne. Quelques mois ont suffi pour que les oeufs issus d’élevages plein air supplantent ceux des pondeuses en batterie. La jeune société Poulehouse a même extrapolé la démarche en offrant une retraite paisible à ses poules réformées.

« La volonté du consommateur de payer plus cher des produits à plus forte valeur ajoutée, notamment la viande de boeuf ou de porc, reste à prouver », nuance, néanmoins, Luc Mounier. Sans être dupe du « welfare washing », qui serait à l’instar du « green washing » du pur affichage à la mode, le chercheur distingue des avancées notoires, dont l’étiquetage (de A à E) sur les volailles, lancé en 2018 par l’association AEBEA coalisant plusieurs ONG et distributeurs. Très zélés sur ce point, les Fermiers de Loué ont, par exemple, quadruplé le linéaire des perchoirs de leurs volailles dans ce cadre.

Boycott

Le risque de dégradation de l’image est un autre enjeu. Herta, récemment épinglé par l’association L214 pour les pratiques d’un élevage de sa « filière préférence », en a fait les frais avec, à la clé, des appels au boycott en Angleterre. L’industrie du luxe est particulièrement aux aguets sur ce point, pour le cuir. Inversement, les industriels rivalisent en termes de communication sur de nouveaux concepts d’élevages en plein air. C’est le cas de Fleury Michon ou de Bordeau Chesnel.

A Plestan, dans les Côtes-d’Armor, 265 truies s’installeront bientôt dans un élevage connecté, « où les animaux pourront évoluer dans plusieurs zones de vie », explique le groupe Le Gouessant, qui prend cette initiative. « Des capteurs et des caméras recueilleront le maximum de renseignements sur le comportement des animaux. » De telles pratiques répondent cependant à une demande prémium. « Il serait impossible, compte tenu des surfaces nécessaires à ce mode d’élevage de fournir l’intégralité des besoins de cette façon », pointe Raphaël Guatteo.

Pâturages

Le LIT Ouesterel, association fondée par l’Inrae et les coopératives Terrena et Eureden, est l’un des foyers d’innovation en matière de BEA. Ce laboratoire d’innovation territoriale, créé en 2019, réunit une quarantaine d’acteurs de l’industrie, de la grande distribution, des ONG et des académiques et des start-up. Prudent sur l’enjeu d’initier une nouvelle couche réglementaire qui s’imposerait aux agriculteurs, il mène une série d’expérimentations en conditions d’élevage pour les généraliser si possible.

En Centre-Bretagne, notamment, c’est l’arrêt de la castration des porcs – sur lequel le groupe Cooperl s’est engagé – et les nouvelles configurations de bâtiment d’élevage qui sont étudiés. Près d’Ancenis, en Loire-Atlantique, on travaille sur les circuits courts, limitant les transports d’animaux . Dans le pays d’Argentan, en Normandie, les études portent sur l’abrogation de l’écornage des veaux et sur la façon de concilier grands troupeaux et pâturages, ce qui peut être contre-intuitif.

« Ce n’est pas parce que l’animal est au pâturage que son niveau de bien-être augmente », relève Raphaël Guatteo. « Tout dépend si la pâture est confortable, si elle apporte assez d’aliments, si elle offre des abris… »

« Un éleveur ne peut avoir un troupeau productif si les animaux n’ont pas un certain de niveau de bien-être », poursuit le vétérinaire, évoquant la notion de « one welfare », selon laquelle le bien-être animal, celui de l’éleveur et les enjeux environnementaux sont liés.

La semaine vétérinaire – Bien-être animal – Le CLAPAV, un lien entre vétérinaires et APA

Beaucoup d’associations de protection animale (APA) sont légitimes en termes de sérieux et d’action, mais leurs relations avec les vétérinaires ne sont parfois pas encore si simples… Présentation du récent comité de liaison Associations de protection animale et vétérinaires (Clapav), qui entend promouvoir ce dialogue.

Interview de Jean-Yves Gauchot, président de la fédération des Syndicats vétérinaires de France (FSVF) et de Luc Mounier, directeur des formations de VetAgro Sup.

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