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Retour sur la présence de la Chaire bien-être animal au Sommet de l’Élevage : quelles innovations pour demain ?

Le 5 octobre 2022, la Chaire bien-être animal organisait un après-midi mettant à l’honneur des innovations mises en place par des éleveurs en matière de bien-être animal dans leur exploitation. Le public était au rendez-vous avec plus de 80 personnes présentes.

à retenir

Le 5 octobre, la Chaire bien-être animal organisait un après-midi mettant à l’honneur des innovations mises en place par des éleveurs en matière de bien-être animal dans leur exploitation. Le public était au rendez-vous avec plus de 80 personnes présentes.

Une table-ronde

Au travers d’une table-ronde centrée sur les jeunes animaux, nous avons eu le plaisir d’échanger avec Didier Bonnard, éleveur de vaches laitières à Saint-Martin-en Haut (Rhône) qui procède à la séparation tardive entre mères et veaux ainsi qu’à Adrien Montefusco, éleveur de porcs à Saint-Yvi (Finistère), qui favorise la sociabilisation précoce des porcelets. En miroir de leurs témoignages, des scientifiques étaient présents pour partager le fruit de leurs recherches en matière de bien-être des animaux : Dominique Pomiès, dont les recherches à l’INRAE sont centrées sur les relations veaux-mères dans les systèmes laitiers de montagne et Isabelle Veissier, directrice de recherche à l’INRAE, une des scientifiques précurseurs en matière de recherche sur le bien-être des veaux, vaches et taurillons.

Un veau avec sa mère dans le cadre des recherches effectuées par Dominique Pomiès à l’INRAE ©Dominique Pomiès

Des innovations pour un bien-être amélioré, pour les animaux comme pour les éleveurs

Didier Bonnard et Adrien Montefusco ont témoigné non seulement de l’attention et du soin qu’ils portent à leurs animaux et leur bien-être au quotidien, mais aussi de leur propre confort de travail. En effet, Didier Bonnard évoque le gain de temps de travail grâce à l’autonomie de ses veaux pour s’alimenter. Séparés de leur mère qu’aux alentours d’un mois et demi, les veaux ont accès ad libitum à la mamelle de leur mère. Didier Bonnard rapporte que cette pratique, mise en place chez lui, ne dégrade pas la qualité ou la quantité de lait produite par son troupeau et participe à l’équilibre dans la relation mère-veau. Pour Dominique Pomiès de l’INRAE, il s’agit en effet d’une pratique bénéfique sur le plan du bien-être animal. La séparation tardive mère-veau fait toujours l’objet de recherches scientifiques : d’autres pratiques comme une séparation dissociée du sevrage ou encore une séparation par lots (plutôt qu’individuelle) apparaissent comme des leviers permettant de réduire le stress des veaux au moment de la séparation. 

Adrien Montefusco a lui aussi cherché à réduire le stress et l’agressivité chez ses porcelets en mettant en place une sociabilisation précoce entre porcelets.

Sociabilisation précoce des porcelets à la maternité – ferme d’Adrien Montefusco ©Adrien Montefusco

Les porcelets issus de différentes portées ont l’opportunité de rentrer en contact grâce à l’absence de barrière de séparation entre les truies allaitantes. Si cela nécessite en amont un état des lieux sanitaire afin de ne pas créer de conditions favorables à la propagation de maladies, l’éleveur constate qu’il n’a toutefois pas observé d’augmentation de maladies depuis deux ans, date à laquelle il a mis en place cette pratique. Le sevrage s’en retrouve facilité et les porcelets mettent en place une hiérarchie sociale au sein du groupe plus facilement. 

En revanche, bien qu’espéré, le mélange précoce entre porcelets n’a pas diminué dans son élevage le risque de caudophagie (porcelets qui se mordent la queue entre eux).

Les deux éleveurs témoignent de la bonne santé de leurs animaux et on ne peut que constater leur propre épanouissement à exercer leur métier de cette manière. Et quand on leur pose la question de savoir s’ils feraient machine arrière, ils répondent tout simplement « Pourquoi le ferions-nous ? ».

Beaucoup d’observation, un peu d’audace et des regards croisés

Les initiatives de Didier Bonnard et Adrien Montefusco sont avant tout le fruit d’une intuition qu’ils ont mise en place dans leurs exploitations… intuition allant parfois même à l’encontre d’avis de professionnels de l’élevage. Le dialogue entre les éleveurs et les chercheurs scientifiques apparaît essentiel et bien souvent fructueux : les innovations en matière de bien-être des animaux sont le fruit de la rencontre et des échanges entre ces derniers. Les éleveurs mettent en place petit à petit de nouvelles pratiques souvent intuitives et fondées sur une observation fine de leurs animaux, et cela permet à la recherche scientifique d’explorer de nouvelles pistes et conforter des hypothèses et bonnes pratiques. En parallèle, les éleveurs montrent la preuve par l’exemple, ce qui peut contribuer à diffuser, avec le temps, de bonnes pratiques à d’autres élevages. 

L’observation fine de ses animaux, c’est aussi la méthode décrite par Audrey Thonnat, éleveuse de vaches laitières en Haute-Loire qui a repris l’exploitation de son père il y a cinq ans et qui met en place de nombreux objets insolites dans sa ferme afin d’enrichir le milieu et améliorer la relation humain-animal. Ses vaches sont ainsi habituées dès leur plus jeune âge à côtoyer divers objets aux couleurs et matières variées, détournés de leur usage premier : des bouteilles en plastique, des bouées, des brosses, des plumeaux, des bidons, des ballons… Autant d’objets que ses vaches côtoient au quotidien dans le but d’être stimulées et habituées aux situations nouvelles et de développer des capacités d’adaptation aux changements. On pourrait se dire que cela constitue une charge de travail en plus, voire une perte de temps : mais non, car Audrey Thonnat connaît ainsi parfaitement chacune de ses vaches et lorsqu’il s’agit de les déplacer, de les soigner ou de déceler les prémices d’une maladie, la tâche est grandement facilitée par la coopération de l’animal qui, en outre, se montre moins stressé au contact de l’humain. Malgré tout, l’enrichissement du milieu n’est pas encore une pratique courante dans les élevages de bovins en France… bien que rien ne semble s’opposer à l’application de telles pratiques tant pour les vaches laitières qu’allaitantes, quelle que soit la taille de l’élevage.   

Audrey Thonnat développe la relation humain-animal avec sa vache Sauterelle ©Anaïs Genevay

La « traque à l’innovation » du LIT Ouesterel

Le travail effectué au quotidien par les éleveurs et les scientifiques en matière de bien-être des animaux n’est pas suffisant pour assurer une diffusion à large échelle des innovations ou des bonnes pratiques. D’autres acteurs ont un rôle à jouer pour mettre en lien les différents acteurs. Et justement, identifier et diffuser des innovations en matière de bien-être des animaux : c’est l’objectif de la « traque à l’innovation » menée par l’association LIT Ouesterel sur le territoire du Grand Ouest, que ce soit au niveau des élevages de bovins, porcs ou volailles. Clémence Bitu, cheffe de projet Innovation en santé et bien-être animal au LIT Ouesterel, nous a présenté ce projet qui permet, notamment à travers des visites d’élevages et des recherches bibliographiques, de mettre en avant des solutions numériques, matérielles, des « trucs et astuces » ou encore des pratiques d’élevage en faveur du bien-être des animaux. Près de 200 innovations recensées par l’association sur des thématiques telles que : le pâturage des grands troupeaux, la gestion de la douleur, la séparation mère-veau, les conditions de vie des jeunes bovins mâles laitiers, l’accès à l’extérieur, les mutilations, l’étourdissement avant abattage… Autant d’innovations qui sont analysées, documentées et présentées par l’association en partenariat avec les Chambres d’agricultures et les Instituts techniques afin d’inciter le plus grand nombre d’éleveurs à reproduire des innovations permettant d’améliorer le bien-être de leurs animaux, leur confort de travail, ou encore réduire l’impact de leur activité sur l’environnement… bref, concourir à une approche « One Welfare » où bien-être animal, bien-être des éleveurs et préservation de l’environnement sont interdépendants et où l’éleveur constitue la pierre angulaire. 

à retenir

CHIFFRE CLÉ

200

innovations d’éleveurs en matière de bien-être animal identifiées et partagées par le LIT Ouesterel via sa « traque à l’innovation »